Proposition d'un équipage "Economie pirate"

Bonjour ami lecteur !
Il y aurait plusieurs points de vue pour présenter ce projet d’équipage ; je vais choisir l’historique. Il y a quelques mois, je me suis posé le problème d’essayer de comprendre comment on arrivait à prendre de mauvaises décisions, en matière d’environnement, politique ou économique. Pourquoi on veut à toute force privatiser, pourquoi un agriculteur détruit son sol, pourquoi on bourre de médicaments une personne malade jusqu’à la rendre dépendante… Pourquoi même au sein d’association dite alternative, on en arrive à rentrer dans des conflits très durs…Paré de quelques lectures – par exemple « La gouvernance par les nombres » d’Alain Supiot --, de quelques visionnages, j’ai commencé à me dire qu’on pouvait concevoir trois économies, une économie étant prise comme un ensemble cohérent de relations : au travail, à la valorisation des échanges et aux processus de production. Sans détailler, on pense presque essentiellement dans la première qui est capitaliste et libérale, il en existe une seconde qu’on pourrait appeler du secteur public. Et il y en a une troisième, qui n’est pas affirmée, mais qui pointe son nez au gré des époques, plus fortement ces dernières années. J’ai essayé de dégager cinq principes de cette troisième économie, qui font que les associations, les initiatives qui s’y inscrivent marchent plus ou moins bien :

  • Primat des qualités suivantes : autonomie, stabilité et prudence (liés aux notions de durabilité, fiabilité…)
  • Assentiment continu dans la prise et le suivi des décisions (notion de démocratie)
  • Reconnaissance de tout travail (lié à la question de la valeur économique et comment la reconnaître)
  • Absence de propriété intellectuelle (lié à la question précédente et à la notion de propriété)
  • Maîtrise totale des processus de production (relation à la technique, à la connaissance et à la notion de progrès) ; ce dernier point doit aboutir pour moi à une certaine sobriété technique et énergétique qui permet de mieux décrire et gérer la complexité

La prise de conscience de cette économie associée à la capacité de tout mettre en réseau permet de de rêver un tissu économique vivant avec ces principes. J’ai commencé à concevoir, comme base d’une réflexion politique, une organisation et des outils pour mettre en œuvre ces façons de faire – dont beaucoup existent déjà, certains au sein même des pirates –. J’ai ensuite rencontré « Voyage en misarchie » d’Emmanuel Dockès qui présentait une utopie contre toute forme de domination; les points communs entre mes pensées et cette lecture étaient si nombreux qu’il y a forcément ici l’expression de quelque chose qui économiquement et politiquement doit trouver à s’exprimer.
Le but de cet équipage est d’une part d’effectuer un travail théorique sur cette vision tripartite de l’économie, puis de proposer ou de concevoir des outils qui permettraient à tout un chacun de créer et de participer réellement la structuration et l’organisation de la troisième, qui de part sa construction autonome et libre, peut faire partie de la piraterie. Pour moi, une fois discuté les principes théoriques, il y aurait deux tâches à examiner d’abord : d’une part la cartographie de toutes les initiatives – je suis effaré qu’à chaque fois que je cherche sur Internet, je tombe sur une association formidable dont j’ignorais tout – et d’autre part une fonction essentielle dans ce cadre-là qui est la gestion du partage des connaissances. Enfin, pour livrer ma vision politique de cette économie, elle devrait permettre en premier lieu une sécession d’une partie des activités du plus grand nombre vis-à-vis des modes de fonctionnement actuels, pour ensuite commencer à penser comment l’insérer, la coordonner avec les deux autres. Je propose comme mode de fonctionnement à cet équipage de l’inscrire dans les principes qu’il entend développer. Le sujet est vaste, tout le monde est bienvenu pour apporter remarques, interrogations et réflexions.

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C’est très intéressant !

Voici un lien pour avoir quelques informations sur la procédure : Création des équipages
N’hésites pas à poser des questions au @Conseil-Transitoire sur la marche à suivre en cas de besoin.

Bon moi et l’économie ça fait 2 mais j’avais quand même assisté à une conférence de Bruno Frère il y a quelques années.

C’est un sociologue belge spécialisé des questions d’économie sociale et solidaire, économie des associations, etc…
La conférence s’appelait “Existe-t’il une alternative au capitalisme ?” et il traitait de ces sujets que tu abordes.

Allez hop un lien (pas très sexy certes mais open) vers des publications :gift: https://orbi.uliege.be/ph-search?uid=u029885 faute de pouvoir participer à cet équipage ce sera ma modeste contribution :smile:

En l’état, le projet me semble un peu flou tel qu’il est exprimé, mais l’idée de constituer un think tank économique pirate me plaît tout à fait. Je dispose d’un bagage théorique sérieux en économie et j’enrichis ce savoir continuellement. J’écris également de la philosophie politique, ce qui me conduit à signifier mon envie d’adhérer à un projet de réfléxion d’ordre économique en quête du modèle économique post-capitaliste.

Outre un travail de définition des nouvelles entités productives, pour lequel l’utopisme devra être modéré sans pour autant se refuser l’ambition, il faudrait effectivement recenser toutes les entreprises, associations ou ONG de l’économie sociale et solidaire (ESS), ainsi que les structures publiques ou privées appliquant les principes de la responsabilité sociétale de l’entreprise (RSE). On pourrait y adjoindre un recensement des cabinets de conseil en développement durable et RSE. Ces recensements, effectués notamment par l’entremise de plateformes dédiées (j’en ai en tête), permettraient de dresser une typologie des nouveaux acteurs de l’économie qui font face à l’éventualité d’une stagnation séculaire et se tournent vers le management des valeurs, au sens sociologique.

J’attire ton attention sur la méthodologie que j’avance: recensement+typologie(s) de l’existant=>définition d’un éventuel nouveau type de structure. Faire l’inverse, en postulant la définition d’un nouveau type d’agent économique, me semble cavalier. Une démarche scientifique rigoureuse voudrait que l’étude aboutisse à l’identification d’un nouveau type d’agent, et non que l’on parte d’une définition postulée sur la foi d’exemples hétérogénes.

Nous pourrions être parmi les premiers à proposer des classements d’entreprises en fonction de leur empreinte environnementale et leur empreinte sociale, et si nous allons assez loin dans cette direction, pourquoi pas lancer un label attestant d’un niveau de performance tri-dimensionnel qui qualifierait l’efficacité économique au regard de la viabilité, la pérénnité et l’utilité sociale de l’activité de production d’une structure. J’ai commencé à travailler sur la conception technique et mathématique de cet indicateur de production responsable.

S’intéresser aussi aux fablabs, hackspaces, ainsi qu’aux théories de l’économie des communs, j’ai des choses à lire à ce sujet et j’ai prévu de lire “le nouveau capital” de Piketty pour faire écho à ma lecture récente du capital qui reprend des couleurs à l’aune de l’évolution de l’économie mondiale vers la formation de monopoles et d’entreprises gargantuesques dans le secteur des nouvelles technologies. La théorie de la valeur de Marx doit servir à revaloriser le facteur travail et sa dimension humaine, le revenu universel redéfinirait le partage de la valeur ajoutée dans un sens plus favorable au facteur travail dans son ensemble, qui a supporté les coûts de la crise des subprimes provoquée par la spéculation à la baisse sur les ménages. Il fut scandaleux et sans doute révélateur que les prêts des banques centrales ne furent conditionnés par aucun accord substantiel avant de procéder au renflouement des banques européennes et américaines. Une faille dans la politique européenne a permis à la corne d’abondance de la BCE de prêter directement 1200 milliards d’euros sans qu’aucune banque n’ait à pâtir de sa propre incompétence qui avait misée sur des produits financiers toxiques. La finance est hors d’atteinte de la politique puisque les états sont largement débiteurs auprès des banques. La dette publique a empêchée la négociation de nouvelles régles et l’ingéniérie financière poursuit son ouvrage de mathématisation du monde en faisant abstraction des réalités que traduisent les chiffres. Dans ces conditions, aucune garantie d’amélioration des pratiques pour prévenir de nouvelles crises qui ne coûtent rien aux banques renflouées mais font tout perdre aux plus pauvres et aux plus démunis, en l’espéce des ménages endettés. Obama a symboliquement laissé mourir une banque de premier plan pour l’exemple, alors que les dirigeants européens exhortaient la BCE a ouvrir les vannes pour les complices de la crise. Face au risque d’incompétence ou de malveillance, la technologie blockchain et les cryptomonnaies sont un véritable espoir d’une régulation monétaire décentralisée inaccessible aux institutions et aux juridictions.

J’écris aussi une étude comparative des modèles commerciaux et des logiques de WIndows et Linux, pour mettre en avant des contre-exemples flagrants à des lois économiques au fondement de l’idéologie libérale, tl que le succès d’un projet de création technologique de pointe sans incitation financière ni structure hierarchique. Je critique aussi sévérement la rationnalité parfaite supposée des agents économiques en microéconomie, l’homo oeconomicus est une chimère dans un monde où 85% des gens préférent se faire exploiter par Microsoft sans même tester une distribution Linux, plus performante et totalement gratuite, fondée sur des valeurs nobles telles que la liberté universelle de diffuser et consulter les savoirs et inventions humaines. La défense de ces valeurs n’intéresse que 3% des propritétaires d’un ordinateur, qui choisissent Linux face aux “systèmes d’exploitations” qui portent bien leur nom, Windows a inventé le droit de fermage numérique d’inspiration féodale par la généralisation du principe de licences logiciels. Qu’il faille encore payer (cher) pour utiliser le logiciel de traitement de texte Word qui fut créé il y a près de 50 ans ne révolte pratiquemment personne car la politique de prix de Microsoft endort le consommateur abêtit par la passivité qcommune dans une société de consommateurs où les acteurs qui portent le changement et l’innovation sont bien minoritaires.

Bref, je soutiens ce projet et suis prêt à y contribuer, mais la méthode de travail reste à définir et les objectifs doivent être affinés.

Cordialement,
V4l4ll4

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C’est précisément ce genre de discussion que j’aimerais susciter au sein de cet équipage, qui pourrait s’appeler « réflexion sur une économie pirate ». Je vais essayer de dissiper le flou.

Ce n’est effectivement pas une étude sociologique de l’économie sociale et solidaire qui aboutirait à une caractérisation – que Bruno Frère, que je ne connaissais pas, cité par @guip, a fait, aboutissant à une typologie à quatre valeurs – que je propose mais de répondre à la question suivante : est-il intéressant de concevoir l’économie, au sens d’ensemble cohérent de relations au travail, aux échanges et à la production en trois pôles ? Un pôle capitaliste, un pôle communiste et un pôle anarchiste – je simplifie honteusement, je ne sais pas comment nommer les trois économies pour ne froisser ni ne faire peur à personne –. Si oui, je pense que les circonstances sont réunies pour imaginer une structuration et une organisation de cette troisième économie – voir « Voyage en misarchie » d’Emmanuel Dockès –.

Si non, j’espère que l’équipage aura produit ou rassemblé quelques connaissances sur ce qu’est une économie, le rôle d’une monnaie, le rôle de la technologie, ce que pourrait être une comptabilité énergétique etc…

@V4l4ll4, je te vois très versé dans l’économie capitaliste. Serais-tu d’accord pour t’occuper de ce pôle ? En essayant d’abord d’en dire une définition par un ensemble de relations au travail – qu’est-ce que le travail, comment le reconnaît-on-, aux échanges (théorie de la valeur, droits de propriété), et à la production ? –. Je peux pour ma part essayer de faire la même chose avec le communisme, j’ai lu du Friot il n’y a pas très longtemps. Pour la troisième, y-a-t-il un anarchiste dans la salle ?

C’est donc un travail de désambigüation du vocabulaire, qui me semble essentiel comme base de réflexion, tant les termes en isme de part leur histoire sont polysémiques.

Ensuite, sur l’utilisation des principes de fonctionnement – surtout pas des valeurs – des acteurs des différentes économies, tels que les cinq que j’ai cités pour l’anarchiste, c’est effectivement une modélisation que j’essaye de faire non pas en vue de prédire, d’expliquer, d’agir ou de proposer quelque chose pour notre économie – qui est et sera toujours, sauf catastrophe, un entremêlement de toutes les formes d’économie – mais en vue de clarifier la pensée, en même temps que de simplifier l’éventuelle construction d’une économie anarchiste.

Enfin pour les objectifs à plus long terme, je propose de créer du dissensus, de la controverse et si par extraordinaire, on tombait d’accord, de les fixer à ce moment-là (hey, un petit livre noir, « manifeste pour une crypto-économie pirate »). Etant d’accord avec moi-même (et encore…), j’ai pour ma part comme objectif de concevoir des outils qui ressembleraient beaucoup à ceux qu’à imaginé Emmanuel Dockès pour proposer aux acteurs de cette troisième économie, dont beaucoup sont dans la fameuse économie sociale et solidaire et qui me semblent avoir des fois le cul entre trois chaises (capitaliste, communiste et anarchiste donc), de s’asseoir quelque part.

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Je comprends mieux ta démarche @Gul.
Je suis tout à fait ouvert à touet réflexion d’ordre socio-économique, philosophique ou politique donc je suis partant pour me charger de ce que tu définis comme “le pôle capitaliste”, je connais les analyses de Zombart, Braudel et Marx, qui restent les références en matière d’analyse du capitalisme, en particulier Marx (j’en suis au livre 2 du capital, plus que 1800 pages!). Connaissant les principales théories économiques de Smith à Sen, je suis à même de travailler dans ce sens et désireux de pouvoir échanger et mettre en commun nos analyses et nos réflexions.
Partant de l’analyse économique, je tendrai vers la socio-économie qui ne se refusera pas l’apport de la philosophie pour tenter de comprendre notre société et, qui sait, pour aboutir peut être à des propositions de nouveaux modèles.
Tu as parfaitement raison de vouloir commencer ce travail par un effort particulier sur la définition des termes et des ensembles, c’est indispensable pour un travail sérieux.
Après, je n’opposerai pas aussi drastiquement le capitalisme au communisme que tu sembles le faire. A mon sens les expériences communistes, qui n’ont pratiquement rien à voir avec tout ce que contient “le capital”, n’ont fait que substituer une sorte de capitalisme étatique au féodalisme. Il serait d’ailleurs intéressant de démontrer tout ce que l’économie soviétique avait de capitaliste. Ce qui s’oppose complètement au communisme, c’est plutôt l’économie de marché et son corollaire idéologique, le libéralisme.
Pour ce qui est de l’anarchisme je suis assez dubitatif à l’égard de cette théorie, j’en retiens que l’objectif d’abolir la propriété est effectivement désirable en tant que progrès civilisationnel, mais pour le reste il me semble que ce que j’appelle “l’algorithme idéologique” anarchiste contient en lui même l’impossibilité de fonctionner dans le champ social. En s’opposant d’emblée à toute forme d’organisation sociale, il ne me semble pas permettre de constituer une économie, pas plus qu’il ne pourrait 'institutionnaliser un support commun des échanges tel qu’une monnaie. je crois qu’Il brûle trop d’étapes, mais je n’ai pas lu Proudhon ou Bakounine.
Toutes les pistes méritent d’être explorées à ce stade, mais gardons nous de l’utopisme tout en restant ambitieux et inventif.
J’accepte donc de collaborer sur ce projet en commençant par l’entrée que tu me proposes.

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Bon, super, il manque un autre pirate pour embarquer.

Je ne résiste pas à l’envie de partager quelques réflexions sur ce qui constitue les trois économies dans le rapport à la propriété : la propriété de quelque chose est constituée de plusieurs droits, celui d’usage, de libre jouissance de la production et d’aliénation. Dans l’aliénation, on peut regrouper les droits de transformer, prêter, louer, donner, vendre. Qui plus est, ces droits d’aliénation sont appelés souvent, pour la plus grande confusion du lecteur, propriété privée.

Le capitalisme est un système qui considère les droits d’aliénation comme imprescriptibles et inaliénables – et sacrés dit notre constitution…–, il permet une accumulation illimitée.

Le communisme résoud les problèmes liés à ces derniers droits en les supprimant – le droit soviétique ne reconnaît que les deux premiers qui constituent le droit de possession –. Il met en place ensuite des processus de décision pour gérer « collectivement » les droits d’aliénation et devient rapidement en Union Soviétique après quelques débats et essais libéraux – des marchés ont existé pour les produits agricoles, Ford a eu une usine sur les rives de la Volga – un capitalisme étatique.

Pour moi, l’anarchisme n’a pas pour but premier l’abolition des classes sociales mais se doit de lutter contre toute forme de domination : il reconnaît les droits d’aliénation, comme ceux de possession, mais leur assigne des limites. Ainsi, si une entreprise ou un procédé industriel appartient au début à son créateur ou son inventeur, les droits d’aliénation se doivent de passer progressivement et dans des proportions raisonnables soit aux travailleurs, soit aux usagers.

Il me semble que si on veut construire quelque chose de correct économiquement, il faut déterminer d’une part comment gérer ou valoriser clairement les différents droits en distinguant selon les caractéristiques des biens : rivalité, exclusivité, productibilité, et d’autre part de mieux préciser les droits : pour les biens rivaux par exemple la diffusion, retro-ingénierie, modification, paternité…

La gestion de ces droits est liée à la notion de valeur qu’il faut également interroger.

Je n’ai pas une aussi bonne culture des concepts de l’économie, mais je suis partant pour participer à la réflexion sur le sujet, en y apportant la vue sans doute plus naïve d’un citoyen lambda. Sur recommendation de @Gul, j’ai récemment lu l’essai d’Emmanuel Dockès, et y ai trouvé une grande pertinence sur la plupart des sujets abordés, faisant écho à mon actuel ras-le-bol de notre société actuelle (et ponctué, toutes les 3-4 pages, d’un “mépourkoikonfépakomça?!”).
Par ailleurs, dans le cadre de mon travail, et un peu de mes loisirs, je me pose des questions sur la propriété intellectuelle, sa pertinence, sa mise en oeuvre, et la place de la production intellectuelle libre dans le cadre actuel.
Si personne n’y voit d’inconvénient, je veux bien m’embarquer dans cette chébèque, dans la limite de mes modestes moyens et connaissances.

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Alors bienvenue @Vutom!
Je ne connais pas les travaux de Dockès, mais s’il s’agit d’empiler les constats d’échecs, j’espère au moins qu’il avance des propositions de solutions.
La problématique de la propriété intellectuelle peut recouper la réflexion autour des communs.
Personnellement je n’ai pas d’avis au sujet de la propriété intellectuelle, j’aime l’idéal prôné par Linux d’abolition de la propriété intellectuelle au profit de la mise en commun planétaire des savoirs et des inventions, mais il ne serait pas tenable a priori que coexistent des marchés de droit propriétaires lucratifs et des marchés ouverts et libres de droits. Une production intellectuelle est à mon sens de valeur supérieure qu’une production de biens de consommation, il faut donc logiquement que son prix reflète cette valeur intrinsèque, le temps consacré à la production intellectuelle ou l’invention et les coûts d’opportunité que cela peut impliquer.
Le modèle de propriété intellectuel que je condamne est celui de la licence propriétaire sur les logiciels. On paie pour un droit d’usage limité et l’on ne dispose plus du programme mais d’une interface d’accès en protégeant le code source. C’est ce qui permet à Microsoft de générer encore aujourd’hui des profits astronomiques en continuant de faire payer le logiciel Word inventé il y a une 50aine d’années. Quand un produit a été rentabilisé xmillions de fois, on devrait revendiquer qu’il passe dans le domaine public il me semble. La philosophie des licences propriétaires me fait penser à une réactualisation du droit de fermage des temps féodaux: Les gens ne pouvaient que louer des parcelles de terre aux seigneurs propriétaires moyennant un impôt en nature ad vitam eternam. De même, aujourd’hui, on achéte nos ordinateurs assez chers, jusqu’à WIndows 10 il fallait encore payer pour s’en servir à l’aide d’un système d’exploitation (sauf pour les happy fews qui tournaient déjà sous distribution Linux) à l’intérieur duquel il faut encore payer pour se servir d’un logiciel aussi basique que le traitement de texte. Dés lors tout les logiciels sous licence propriétaire se louent et la propriété de ceux-ci n’est pas transférable. On est propriétaire de machines achetées une fois pour toutes mais on doit ensuite s’acquitter du droit d’usage des logiciels, dont certains sont indispensables tels que les antivirus et pare-feux sous windows qu’il faut payer et repayer à une fréquence donnée déterminée par l’éditeur de logiciel qui se comporte en suzerain qui garde jalousement le code de ses programmes.
Sous distribution Linux, la philosophie opensource implique la gratuité, l’accessibilité via le web et l’accès au code source qui permet non pas de s’approprier le programme mais de l’améliorer ou le modifier pour un usage précis, en s’engageant à le mettre en ligne en juste retour du download initial pré-modifié.
La durée d’exploitation commerciale permise pour les programmes devrait être courte à mon sens car en l’état la loi sur la propriété intellectuelle permet essentiellement des systèmes de rentes toujours sous-efficients sur le plan économique. Les utilisateurs (nous tous) devenons les vaches à lait qui paient et repaient pour des droits d’usages dont la durée n’a pas de justification autre que la maximisation de la rentabilité.
On pourrait catégoriser les biens et services relatifs soumis à la propriété intellectuelle et définir des taux de rentabilité plafonds au-delà desquels l’objet de la production intellectuelle tomberait dans le domaine des commons, accessible en opensource. Les licences à vie pourraient être imposées pour certains produits tel que Word et les antivirus sous windows qui sont par essence indispensables pour faire tourner la machine, ou justifient l’achat initial de la machine. Question complexe en tout cas, et ce dés lors qu’il s’agit de fixer un prix sur une production intellectuelle, qui ne peut être indexé sur le temps consacré à l’invention (trop cher), ou sur la portée de l’invention (incertaine et difficilement quantifiable). C’est donc le bon vieux “prix du marché” qui fait loi, soit le prix que d’autres sont prêts à payer pour acquérir la production intellectuelle.
Il est notable qu’un certain consensus se fasse jour au sein de la recherche qui opte de plus en plus pour le libre accès aux travaux intellectuels tels que les articles ou les thèses produites qui, de toute façon, ne se vendaient pas et contribuent à la notoriété des chercheurs dont l’oeuvre devient accessible à tous potentiellement.
Voilà ce qui me vient sur ce thème, as-tu d’autres éléments de réfléxion sur le sujet? En tout cas il apparaît qu’on ne peut envisager un seul modèle de propriété intellectuelle encadré par un droit général tant le terme de production intellectuelle recouvre de produits.

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Au vu des échanges, je suis intéressé à participer -humblement- à cet équipage. Ça me fait beaucoup de bien de lire ces réflexions.

Salut @ThomasWatanabeVermorel!

Ravi que nos premiers échanges t’intéressent, sois le bienvenu dans cet équipage qui va envoyer du lourd!

Au programme pour le moment:

  • Un travail d’étude du capitalisme, du communisme et de l’anarchisme proposé par @Gul (voir messages plus haut). Je suis positionné sur le pôle capitalisme et @gul sur le pôle communisme, si tu es chaud l’anarchisme est libre et quoi qu’il en soit feel free to contribute!
    -Un travail d’étude des entités relevant de l’Économie Sociale et Solidaire ainsi que les entreprises appliquant les principes de la Responsabilité Sociétale des Entreprises. On a évoqué l’idée de recenser un max de structures de ce type en France pour en faire une typologie et étudier plus précisément les différents modèles existant.

-Ces travaux de recherche pourraient alimenter nos réflexions sur des nouveaux modèles de développement socioéconomiques à l’échelle locale/territoriale/vers-linfini-et-laudela! ou des modèles de structures productives innovantes.

-A titre indicatif, @Florie m’a proposé de rédiger une motion pour un programme économique plus musclé pour le PP, ce que j’ai accepté de faire. Je travaille actuellement sur la synthése de quelques centaines d’articles/dossiers/rapports économiques piochés notamment sur des sites de think tank de France ou d’ailleurs. Ces synthèses me serviront à avancer des propositions en terme de politique économique que j’ambitionne de structurer en un programme de développement socioéconomique soutenable. Quand j’aurai suffisamment avancé sur ce travail conséquent, l’équipage économie Pirate sera le lieu privilégié pour discuter/échanger/débattre/compléter/étendre/affiner/… la proposition de nouveau programme.

Avec ces premiers dossiers, on est sûr de ne pas s’ennuyer avant longtemps dans cet équipage!

Je pose ici pour qui veut le dernier travail de synthèse que j’ai effectué en vue de la construction du nouveau programme économique du PP. Il s’agit d’une contraction en 9 pages des 324 pages du rapport Stieglitz/Sen/Fitoussi intitulé « performances économiques et progrès social ». Ça date un peu (2008), il n’y a pas de quoi crier au génie, mais il y a tout de même des infos à piocher. Rapport Sen_Stieglietz_Fitoussi.pdf (65,8 Ko)

Et une petite liste de think tanks français pour qui veut jeter quelques coups d’oeil, on tombe parfois sur de bonnes idées bien argumentées et l’éclairage apporté sur les questions de société est en général plus pertinent que sur les médias traditionnels:

http://www.touteconomie.org/ressourceseco
http://www.feps-europe.eu/en/next-left-publications
fondation jean jaures
Générationlibre
renaissanc numérique
pause philo
altaïr
lecercledeséconomistes
maisouvaleweb
fondapol
réveil citoyen
FEPS
lecercledelalicra
ACTED
ARGO
SYNOPIA
Renaissance-europe
CELL’IE
le Club Jade
le club des vigilants
institut montaigne

C’est effectivement aux licenses régissant le logiciel libre (qu’il faut bien distinguer du logiciel open source, l’un impliquant l’autre, mais pas l’inverse) que je me référais, ainsi qu’aux licenses type Creative Commons pour d’autres types de production. Je ne prétends pas du tout avoir de réponse, mais la réflexion tourne autour de la rémunération de la production. Les droits d’auteur dans leur forme actuelle ne me semblent pas être la bonne piste pour une rémunération à hauteur du travail fourni. À l’inverse, les modèles économiques pour le logiciel libre par exemple se basent soit sur les dons, soit sur la vente de services associés (maintenance, hébergement, etc.). Dans un cas comme dans l’autre, le modèle est relativement fragile à moyen terme.
Étant moi-même chercheur, je me heurte également à ces questions pour la publication de mes travaux. Là encore, le modèle actuel où des éditeurs qui n’apportent pas de compétence (surtout à l’heure du tout numérique) se rémunèrent sur du travail financé par les labos de recherche en le revandant à ces mêmes labos paraît d’un autre temps, mais les solutions alternatives prennent du temps à mettre en oeuvre (notamment du fait de la manière dont le travail des chercheurs et des labos est évalués, souvent en comptant les publications dans des “grandes revues”).
Je suis a priori d’accord avec toi sur le fait que toutes les productions intellectuelles ne peuvent pas être soumises aux mêmes règles (d’ailleurs, les licences libres pour la production de logiciel, d’art, de musique, etc. sont souvent séparées). Il faut que je me documente sur les différentes manières de gérer le droit d’auteur au sens large pour pouvoir proposer des idées plus solides sur ce thème.
D’un point de vue personnel, je suis très favorable aux licenses libres (j’utilise quasi-exclusivement Linux et du logiciel libre sur mes ordinateurs et téléphone depuis presque 15 ans maintenant), à condition de pouvoir rémunérer le travail fourni. Ça dépend aussi beaucoup des autres réflexions liées à cet équipage : par exemple, dans le contexte actuel, beaucoup de PME survivent face aux multinationales principalement grâce aux brevets qui leur permettent de garder une petite longueur d’avance. Si ce modèle est remis en question, alors d’autres possibilités se présenteront.

Ainsi un chercheur est parmi nous! Je vais surveiller davantage mes propos qui privilégient parfois les bons mots ou le sens de la formule au détriment de a rigueur intellectuelle ;-). Dans quel domaine cherches-tu précisément? Je reprends des études avec l’objectif d’aller jusqu’au doctorat, en sciences politiques si l’on m’autorise à m’y réorienter, sinon en économie, mon domaine de formation initial. Tu confirmes ce que j’avais déjà bien compris au sujet de la recherche: On en fait pas pour devenir riche… Compte-tenu de l’importance stratégique de la recherche dans “l’économie du savoir”, et compte-tenu de ce qu’il s’agisse du plus haut niveau de professions intellectuelles, les conditions de travail n’ont pas l’air à la hauteur de l’engagement et l’importance que cela suppose… J’envisage le doctorat par anticipation pour faire l’expérience stimulante de la recherche et rejoindre un milieu d’intellectuels, mais je le vois aussi comme un moyen de me constituer un champ d’expertise valorisable par la suite à des postes plus lucratifs (postes à responsabilités dans le champ de l’action publique par exemple).

Au sujet de notre propos sur la propriété intellectuelle, je butte aussi sur ma méconnaissance du droit relatif à celle-ci. Gageons que les textes y afférant soient touffus et quelque peu abscons… Cela nous empêche de caractériser la propriété intellectuelle de façon précise. L’analyse de la législation en vigueur permettrait peut être d’estimer les points d’impact des lobbys dans l’élaboration et le vote des lois sur la propriété intellectuelle, il faudrait pour cela identifier des aberrations législatives créant des situations préférentielles à la faveur d’un secteur ou d’un produit particulier. L’étude de la législation comparée aux principes présidant à la propriété intellectuelle révélerait peut être quelques incohérences notables entre les principes et l’application de ces principes.

La connaissance de ces principes cadres nous permettraient déjà d’aborder la question de la propriété intellectuelle sur un plan philosophique, je vais profiter de ce que je commence à apprendre le droit pour y regarder de plus près, mais pas sûr que cette lecture t’intéresse… . En possession de ces informations on pourrait situer les différents types de licences logiciels par rapport à l’esprit des lois en cherchant par exemple quels principes permettent l’existence de rentes par le biais de licences propriétaires, droits d’usage limité valant même pour les programmes indispensables à l’usage de l’ordinateur. Quand on a payé plus de 1000€ pour sa machine, on ne se privera pas du logiciel de traitement de texte vendu 70€ en pack, son coût marginal est faible, surtout quand on le rapporte à son utilité. Mais au regard du taux de rentabilité de Word, ou du coût d’une mise à jour de ce logiciel (qui doit mobiliser un graphiste stagiaire au moins 20 bonne minutes!..), son prix est purement scandaleux et n’obéit qu’à une logique commerciale sans aucune justification économique. Rappelons Il a fallut que la plus haute cour de Justice américaine décrète la présence obligatoire d’un membre du comité anti-trust à chacun des conseils d’administration de Microsoft pour éviter l’hégémonie monopolistique mondiale qu’elle aurait obtenu sur la lancée de sa stratégie de prédation concurrentielle. 85% des propriétaires d’ordinateurs fonctionnent avec Windows, et doivent donc obligatoirement s’acquitter du prix des licences d’un antivirus, d’un pare-feu, d’adobe reader etc… C’est ce qui me fait dire que le terme de “système d’exploitation” est une traduction qui convient particulièrement bien au produit phare de Microsoft, qui ne livre pas les logiciels indispensables au fonctionnement attendu d’un ordinateur dès l’achat de celui-ci… Pré-installé et gratuit depuis peu, la plateforme d’exploitation et toute prête à drainer les ressources financières du client captif sans doute hypnotisé par la saturation visuelle des écrans pour ne pas même songer à essayer Linux. Après avoir exploité les brevets des concurrents (ou les avoir mis à la poubelle bien souvent), après avoir exploité les ressources physiques des machines de par la charge que représente Windows en RAM, Microsoft ne se prive pas d’exploiter les porte-feuilles des clients… Notons que ce système d’exploitation commerciale a pour conséquence de plonger une large proportion d’utilisateurs de WIndows dans l’illégalité, en rendant très attractifs les logiciels piratés gratuits. Indirectement, le système de marchandisation à outrance des fonctionnalités d’un ordinateur fait courir d’énormes risques à ses clients (peines de prisons+énormes amendes). Les éditeurs de logiciels et Microsoft sont tout de même particulièrement choyés par les législateurs qui fait d’une large part de sa population des criminels, au moins dans les textes tant qu’il n’y a pas d’autorité de contrôle. Les clients n’ont que le droit que payer sans jamais accéder à la propriété de l’objet de la transaction, ce qui a peu d’équivalent dans l’histoire des économies de marché.

Je suis aussi des 3% de “happy fews” qui tournent sous distributions Linux avec des licences libres. Je suis admiratif et tout acquis par la noblesse et l’ambition de cette éthique du partage de productions intellectuelles, de la défense du droit d’y accéder et d’y contribuer. ce qui rentre bien dans le champ des libertés. Comme tu le dis bien, le modèle économique est néanmoins bien fragile, mais l’ensemble du projet Linux associé aux milliers de logiciels sous licences libres constitue tout de même un contre-exemple remarquables de certaines “lois économiques fondamentales” issues de l’idéologie libérale. Le projet Linux en tant que création nn rémunerée d’une technologie de pointe gratuite plus performante que la version payante. Pas d’incitation pécuniaire, pas de système hiérarchique ni d’encadrement des conditions de “travail” qui n’en est plus vraiment, de quoi faire friser les neurones des économistes orthodoxes! Des microéconomistes n’accepteraient probablement pas la plausibilité de la réussite d’un projet tel que Linux. Pourtant, la figure chimérique de l’homo oeconomicus, qui agit uniquement dans son intérêt, est parfaitement renvoyé par la preuve au bestiaire des créatures fictives où l’égérie néoclassique antipathique rejoint Spider-man, le Yeti et le Pére Noël. On peut concevoir une forme d’intérêts non pécunier qui motive la réalisation (satisfaction de contribuer à un projet international pionnier motivé par des valeurs universalistes), mais ce qui ne se quantifie pas est exclu des théories et des modèles de ce type. Ça me fait penser à un économiste du FMI qui commente l’échec, dans des pays pauvres, de l’application de modèles de développement économique imposés par cette institution au bulldozer, il conclue, face caméra et très à l’aise que ces échecs s’expliquent par le fait que “Les habitants des pays pauvres ne sont pas rationnels.” (!!!) Caricature du théoricien intégriste qui conclut de la preuve de l’inopérabilité de sa théorie que c’est l’expérience qui a tort, pas sa théorie… Et surtout, de là à dire que les pauvres sont trop cons pour se développer, il n’y a vraiment qu’un tout petit pas…

Je me rends compte que j’ai beaucoup écris pour ne rien apporter à ta réflexion… Je cesse mes digressions… Le droit à la propriété est un Master dédié parmi les cursus en droit, tu t’attaques donc bien à un sujet d’expertise… Quel est précisément ton sujet de recherche a propos de la propriété intellectuelle?

Bjour,

je n’ai aucune competence ,
mais un peu d’experience:

Sur le le dépot de brevet (France /Europe voire plus) c’est un cout assez conséquent selon la complexité de " l’invention" et pour l’avoir vécu malgrés les 2 premieres années de probations, le service europeen des brevets peut le contester (perso 14 ans aprés !!) et là faut re cracher au bassinet.

Pour ce qui est des échanges concernant la propriété intellectuelle des brevets et inventions, ou les connaissances plus généralement, ils constituent pour moi une circonstance d’émission monétaire : on peut imaginer par exemple que l’acquéreur ou l’apprenant paye 1 et que le vendeur reçoive 2 (ou 3, bref avec un multiplicateur) ; et c’est plus simple avec une monnaie électronique…

Je ne vois pas bien comment cela être appliqué à l’économie réelle tant que les cryptomonnaies ne parviennent pas à pénétrer l’économie réelle. Mais il y a surtout une conséquence directe à cette idée dont personne ne veut: l’hyperinflation. On peut imaginer qu’une transaction puisse donner lieu à une émission monétaire prévue dans le code source qui ajoute 1 à 1 quand les transactions ont lieu sur le marché de la propriété intellectuelle (suppose que le système l’identifie en tant que telle), ce qui donnerait bien: Utilisateur de l’invention/Acheteur 1 (+1)=2 Vendeur/Créateur de l’invention. Mais dans l’économie réelle une transaction se fait en direct de l’acheteur au vendeur et l’intermédiaire éventuel qu’est la banque est chargée du transfert des fonds de l’un à l’autre. Il faudrait accorder à chaque banque le droit d’émettre de la monnaie pour qu’elles puissent ajouter 1 à 1 en faveur du vendeur par la création monétaire (elle ne va pas le prélever de ses fonds propres), en supposant que la banque sache qu’il s’agit d’une transaction portant sur un bien du domaine de la propriété intellectuelle. La création monétaire provoque de l’inflation et il est donc préférable qu’il y ait une instance de régulation monétaire qui surveille en même temps la masse monétaire pour modérer sa croissance afin de ne pas générer d’inflation excessive. En admettant qu’on rétablisse le droit de création monétaire à chaque banque, Avec ce que tu proposes, le vendeur fixe initialement son prix à x, quand il réalise une vente il reçoit 2x, donc ce qu’il vend vaut désormais 2x, et si il crée une nouvelle invention qu’il met sur le marché, il fixera son prix à 2x, qui est la valeur du marché d’après l’expérience qu’il en a. Quand un client décidera d’acheter, il paiera le prix 2x qui deviendra 4x par création monétaire, ce qui deviendra le nouveau prix de marché de son invention. Et ainsi de suite, ce qui donne une inflation exponentielle dans lequel la valeur d’un bien, c’est à dire son prix de marché, double à chaque transaction effectuée jusque ce qu’il n’y ait plus d’acheteur prêt à mettre le prix demandé pour acquérir le bien. Parti de prix=x, ce système de création monétaire automatique donne prix=x*2k avec k=nombre de transactions effectuées. Concrètement, ce système ferait exploser les prix des biens du domaine de la propriété intellectuelle jusqu’à ce que plus personne ne puisse suivre. Le marché des biens de la propriété intellectuelle serait en décalage complet avec les prix d’équilibre sur les autres marchés, et le prix de ces biens deviendrait si élevé qu’il serait vite hors de prix pour quiconque. Les vendeurs seraient amenés à baisser le prix de leur bien qui ne se vend pas, mais à la première transaction le prix double à nouveau, pour revenir à un niveau que personne n’est prêt à suivre. Si l’on s’en réfère à la théorie monétariste, tu proposes un système qui créé 100% d’inflation sur un marché à chaque transaction effectuée,d 'où l’hyperinflation qui exclue très rapidement tout les demandeurs (acheteurs) du marché car p (le prix) est trop élevé pour eux. Les inventions devenant des biens/services hors de prix, il y aurait à la longue une désincitation à inventer et à se positionner en tant que vendeur sur ce marché où les prix s’enflamment mais où les clients s’épuisent vite. La deuxième conséquence de cette création monétaire serait d’augmenter l’offre de monnaie en circulation de façon automatique, pour une demande à peu près constante, ce qui fait baisser le prix de la monnaie (sa valeur d’échange en dollars ou euros pour une cryptomonnaie). L’émission monétaire automatique génère donc de inflation à un rythme délirant tout en tirant la valeur de la monnaie vers le bas, donc les prix augmentent pendant que la valeur de la monnaie diminue, ce qui a pour conséquence de faire augmenter les prix! Et nous voila dans la boucle de l’hyperinflation qui fait tendre les prix vers +infini et qui fait tendre la valeur de la monnaie vers 0. La cryptomonnaie ne serait bientôt plus utilisée par personne dans un contexte où les cryptomonnaies se concurrencent. Tout le génie de Satoshi Nakamoto c’est d’avoir conçu un système d’émission monétaire qui contribue au fonctionnement du système de transactions sans déprécier la valeur de la monnaie, c’est pour cette raison que le rendement en bitcoins des blocks est divisés par deux tout les x bocks (je n’ai plus le chiffre très élevé en tête). Il me semble qu’en terminant un block on récolte aujourd’hui 12.5 bitcoins, alors qu’il y a six ans on en récoltait 50. C’est pour que la masse totale de bitcoins ne croît pas trop vite, laissant le temps à la demande de bitcoins de croître pour ne pas déprécier sa valeur. A mon sens cette loi d’émission monétaire implique même une hausse tendancielle du prix du bitcoin à moyen terme (5 ans) puisque la croissance de l’offre ralentit (la vitesse du cryptage des transactions augmente avec la puissance des CPU/GPU mais elle diminue avec l’augmentation automatique du niveau de difficulté du cryptage) tandis que la demande de bitcoins croit avec l’augmentation du nombre d’utilisateurs du bitcoin pour sa valeur d’échange ajoutée à l’augmentation du nombre de spéculateurs. C’est pourquoi la valeur du bitcoin dans 5 ans sera selon toute vraisemblance bien plus élevée qu’aujourd’hui, où elle est bien élevée qu’il y a 5 ans. Voilà, là où le bas blesse donc, c’est que l’augmentation de la masse monétaire créée de l’inflation, et qu’en plus le système de création automatique de monnaie fausse les prix du marché qui doublent à chaque transaction. Ta proposition fait courir le risque de l’hyperinflation, comme dans les années 20 en Allemagne où il est arrivé qu’en quelques semaine les prix soient multipliés par plusieurs milliards. La planche a billet a tellement chauffée il aurait fallu une brouette de billets pour acheter du pain et au pire de cette hyperinflation, la valeur de l’ensemble de la masse monétaire circulant en Allemagne fut un temps inférieure au prix de marché d’un steak de boucher… L’homme le plus riche d’Allemagne n’était pas assez riche pour s’acheter un oeuf au prix de marché, le mark était devenue une “monnaie de singe” et le troc réapparut. Ce qui explique pourquoi l’Allemagne a tenu à ce que la BCE se trouve chez elle et qu’elle ait pour mission principale, non pas le soutien de la croissance économique, mais la maîtrise de l’inflation.

L’idée des nouvelles monnaies est justement de reprendre ce pouvoir. Par exemple la monnaie libre occitane.

Euh, pourquoi ? Non, le prix de vente reste le même, 1. Il se crée autant de monnaie que de transactions. Pour éviter l’utilisation commerciale du brevet que tu décris, on peut restreindre le droit de vente à l’inventeur ; on voit ici que l’utilisation commerciale d’un bien pose bien des problèmes (équilibres, marchés, inflation) et qu’il faut restreindre dans ce cas le droit de vente, mais c’est toucher à la propriété…Pour moi, c’est possible et souhaitable depuis que tout le monde est relié, on a beaucoup moins besoin d’intermédiaires des échanges.

Oui, petit à petit, si l’invention ou la connaissance a beaucoup de succès, il faut faire baisser le multiplicateur. Quand l’inventeur ou le producteur de la connaissance est suffisamment rémunéré, le produit devient libre et les échanges se font gratuitement.

  • Sans organe central de vigilance sur la masse monétaire, et si toutes les banques sont autorisées à émettre de la monnaie, l’émission de monnaie s’emballe (la banque peut accepter d’accorder tout les crédits sans risque de perte par création monétaire, elle peut aussi fixer sa propre rémunération par création monétaire) ce qui produit de l’inflation. Quand la masse monétaire en circulation augmente il y a hausse des prix, donc le “pouvoir d’achat” supplémentaire créé par l’émission de monnaie est résorbé par la hausse des prix (à moins d’interdire la libre fixation des prix, qui serait la prérogative d’une administration, mais cela renvoie au débat sur la valeur: comment déterminer la juste valeur de chaque chose? Des prix trop bas favorisent le pouvoir d’achat mais démotiveraient l’activité de vente qui rapporterait peu, des prix trop hauts incitent la production de biens ou services marchands mais paupérisent la population). Ce n’est pas un hasard si la seule économie communiste ayant perdurée avec succès est l’économie chinoise qui a longtemps indexée sa monnaie sur le dollar et ne détermine pas les prix à ma connaissance (façade communiste mais fonctionnement libéral des marchés intérieurs avec appui de la monnaie sur la valeur capitaliste par excellence, le dollar qu’elle acquière en masse). Cuba avait d’abord émis sa propre monnaie, le peso cubano, dont la valeur s’est vite dégradée du fait d’une création monétaire excessive, si bien que les vendeurs de biens marchands se sont mis à refuser le peso cubano au profit de monnaies étrangères, et surtout le dollar. Le gouvernement a admis à moitié son échec en créant une autre monnaie parallèle, le peso convertible, le seul pouvant être échangé contre des devises étrangères. Il est indexé aussi sur le dollar par une encaisse bancaire dans cette devise. Même pendant le blocus américain, c’est le dollar qui tenait l’économie cubaine. La population cubaine n’est payée qu’en peso cubano, monnaie de singe refusée par 75% des magasins en 2010, les magasins d’État restant étant pillés jusqu’au trognon dès que des marchandises y sont vendues en peso cubano. Le peso convertible, le seul a valoir quelque chose, est réservé aux touristes et, bien sûr, à Castro et sa cour).

  • Si le vendeur fixe un prix à 1 et qu’il reçoit 2, il estime logiquement que ce qu’il vend vaut 2 puisque c’est l’information qu’il reçoit du marché, la variation tendancielle des prix étant à la hausse dans toute économie en croissance, les prix augmentent “naturellement” au rythme où croît la masse monétaire, qui augmente à chaque transaction. Le produit de la vente étant artificiellement gonflée par la création monétaire qui enrichit le vendeur/inventeur deux fois plus vite qu’un vendeur non inventeur, ce serait une forte incitation à l’innovation mais cela déprécierait relativement la valeur des biens/services non inventés par le vendeur. La création monétaire automatique à chaque transaction ferait croître la masse monétaire indépendamment des éventuels efforts de régulation des banques par la diminution d’octroi de crédits (provoque une baisse de l’investissement). En croissant, la masse monétaire artificiellement gonflée fait monter les prix (vendeurs/inventeurs en possession d’un pouvoir d’achat au moins deux fois supérieur aux vendeurs non acheteurs, et encore plus important que les acheteurs non vendeurs, ce qui créerait une caste 'inventeurs riches tirant tout les prix vers le haut au détriment du reste de la population). Avec un multiplicateur faible, l’écart de richesses serait réduit mais le processus serait le même, il se ferait juste plus lentement.

  • La proposition de régulation du niveau du multiplicateur en fonction du montant total des ventes réalisées ou du nombre de ventes réalisées fixe de facto la rentabilité totale d’une invention, au-delà de laquelle l’invention devient gratuite. Dans ces circonstances, j’attendrai que les couillons pressés réalisent les achats jusqu’à ce que l’invention devienne gratuite, et donc tout le monde agirait de même, bloquant les premières ventes, ce qui ferait baisser les prix de l’invention jusqu’à ce qu’elle coûte presque rien. Ça dégraderait donc la valeur des inventions quand bien même celles-ci seraient artificiellement multipliées par la valeur retenue, qui augmenterait mécaniquement inversement à la baisse du prix de marché, ce qui accélère l’émission monétaire qui fait augmenter le prix de tout les biens non-inventés.

  • L’idée d’échanges gratuits impliquerait l’obsolescence de la monnaie, mais alors comment détermine-t-on la valeur de chaque chose et qui voudrait encore travailler pour produire ou inventer si les biens/services n’ont plus de valeur? Une baguette de pain peut-elle être échangée contre un porte-avion? Non, il faudra x baguettes de pain pour que le vendeur du porte-avion accepte de céder son porte-avion, avec x un nombre fonction du temps de travail total consacré à la fabrication du porte-avion rapporté au temps de travail total consacré à la production d’une baguette de pain. Et c’est à supposer que le vendeur de porte-avion accepte la valeur d’usage du pain, c’est à dire si il en a besoin. A L’usage on justifierait donc la pertinence de la réapparition d’une monnaie en tant que support des échanges. La gratuité de tout entraîne la fin de la production à moins de réinstaller une monnaie légitime (acceptée par tous), on tourne en boucle.