Note : je ne peux pas mettre plus de 2 liens étant un nouveau pirate
Bonjour,
Voici mon point de vue en tant qu’ex technicien télécom.
La problématique actuelle vise à anticiper et prévenir une saturation complète des réseaux mobiles. L’histoire de l’informatique et des télécom a toujours montré que la sobriété a elle seule n’a jamais suffit. En fait, matière de réseau, on n’assiste pas vraiment à une fuite en avant mais on a plutôt toujours été à la ramasse, à courir après un train de retard, le futur étant inconnu (on a un exemple connu avec l’IPV4 pour lequel on n’avait jamais imaginé que l’on n’arriverait à bout du stock d’adresse IP).
En matière de télécom, on a un bel exemple avec la 3G
La 3G, conçue en 1999 (pour contexte, le 1er iPhone date de 2007) n’avait jamais prévu l’explosion de l’internet mobile. A l’origine la 3G a été conçue pour faire de la visiophonie (exemple : pub SFR de 2006 ), la data qui se limitait pour le grand public à l’accès au WAP (une sorte de web dégradé) venait s’ajouter comme un bonus, mais en aucun cas comme la fonctionnalité principale.
En France, la 4G est vraiment arrivée in extremis en remettant la donnée (et non la voix) comme étant au coeur du réseau. Son protocole était tellement chiadé qu’à la base il n’était pas possible de téléphoner en 4G. Le téléphone switchait (et switche toujours pour l’entrée de gamme) en 2G ou 3G à l’arrivée d’un appel. C’est bien plus tard que la voix sur la 4G a été implémentée sous la dénomination VoLTE.
A l’époque, on se plaignait lors du déploiement de la 4G que la 3G se dégradait à vue d’oeil “faute de maintenance”. La réalité était toute autre : en vérité la 3G n’arrivait pas à suivre, les gens ne switchaient pas assez vite vers la 4G pour la soulager d’un traffic réseau toujours plus important… La 4G était une bénédiction surtout pour l’opérateur, qui voyait un moyen abordable de désaturer un réseau au bord de l’asphyxie.
Afin d’inciter les gens à passer en 4G, Free a par exemple proposé une enveloppe data plus importante pour la 4G que pour la 3G : rare sont les opérateurs qui ont fait payer plus cher la 4G passé la nouveauté. Il était plus économique pour l’opérateur d’avoir un client 4G que 3G.
De nos jours, tous les smartphones étant 4G, la 3G marche au top, de moins en moins de tel l’utilisant. Parfois même, on retrouve un réseau 3G plus rapide que la 4G, qui elle sature par endroit. Par exemple ; Au boulot, limiter mon tel à la 3G me permet d’avoir du 10 Mb/s stable (contre moins de 1Mb/s en 4G).
Un point qui limitait la 3G (en plus de son protocole pas adapté à l’usage) est la liaison data des sites.
Les “nouveaux” sites 3G acceptaient au maximum du 8 à 16 Mbit/s pour l’ensemble du site. Dans les faits on dépassait rarement les 8 Mb/s via l’agrégation de 4 liens E1 à 2Mb/s, et il n’était pas rare de voir des sites limités à 4 ou 2 Mb/s de par leur lien réseau. (1 lien E1 coûte très cher, le débit étant garanti)
Alors que le site 3G arrosait plusieurs milliers de personnes (sur un lien 8 Mb/s partagé entre tous), on comprend bien que le lien saturait. Ajouter des fréquences sur le site ne servait à rien. (Et quand on te vendait de la 3G à 14 Mb/s par téléphone c’était souvent bidon. La baie entière et ses cellules (au moins 3) étaient souvent câblées sur du 8 Mb/s, et au mieux du 16 Mb/s).
En 3G, il fallait des nouveaux sites pour réduire la taille des cellules et rajouter de la bande passante. Or la création d’un nouveau site : recherche et location du terrain, création des accès, équipement et dressage du pylône, apport de l’énergie et de la data, est longue, fastidieuse et surtout très onéreuse. Cela devient franchement difficile quand les Robins des Toits s’en mêlent.
La 4G, elle, débarquait directement avec son lien fibre (dans la plupart des cas), permettant d’upgrader un site, mais restant malheureusement incompatible avec la NodeB (la baie 3G) implantée sur le même site. On eut donc 3 arrivées data distinctes sur un même site :
- 1 ou 2 lien Abis : 2 Mb/s par lien pour la 2G
- 4 E1 : 4*2Mb/s pour la 3G (Note : il existait des sites 3G fibrés, mais ils étaient très rare à l’époque)_
- 1 fibre 100 Mb/s pour la 4G
Et la 5G dans tout ça ?
La 5G semble être avant tout conçue pour tolérer plus facilement les micro cellules (on peut faire des micro cellules en 3G et 4G mais c’est “compliqué”). Par contre il y a un confusion courante dans les médias : presque tous indiquent (à tort) que l’on ne peut faire “que” des micro cellules en 5G en raison de fréquences utilisées assez haute dans le spectre, via du 3,6 GHz puis 26 GHz contre respectivement 700 MHz à 2600MHz pour les générations précédentes (plus une fréquence est élevée, moins elle porte loin).
Or cette information est fausse, la 5G ne porte pas spécialement moins loin que la 3G ou 4G, elle utilise aussi les fréquences plus basses (Free souhaite par exemple l’exploiter sur du 700 MHz). Comme l’ANFR le mentionne sur son site on parle beaucoup du 3,6 GHz et du 26 GHz car l’Europe est en train de normaliser (standardiser et réserver) l’usage de ces fréquences. C’est extrêmement compliqué de normaliser sur les fréquence plus faible car elles sont déjà utilisées à d’autres usage. Pour les autres fréquences il est donc fort probable que les pays voire les opérateurs fasse chacun dans leur coin en fonction de ce qu’ils sont de dispo sous la main.
Le rapport EELV
Je n’approuve pas ce rapport :
- Il y a une confusion permanente entre l’outil (la 5G) et l’usage futur (dont on n’a seulement une vague idée)
- l’IoT se développe déjà à vitesse grand V et se développera avec ou sans la 5G. Sans, ça nous éclatera juste notre réseau actuel.
- Si l’on veut lutter pour notre vie privée, il faut légiférer pour sa protection, pas lutter contre une évolution technologique. (Pour comprendre plus simplement : On n’arrêtera pas le traffic de drogue en fermant une autoroute, un port ou un aéroport)
- Il n’y a pas d’analyse d’impact prenant en compte la création du même service (anticipant un besoin), mais sans la 5G.
De mon avis personnel
- Certes, la technologie dispose de l’espace qui lui est fournie, jusqu’à une certaine limite (en gros par exemple, plus les CPU sont costauds, plus les logiciels sont gourmands en ressource)
… Mais …
- Les micro sites devront quoiqu’il en soit se développer pour faire face à la demande, reste à savoir si l’on veut que ce soit avec une technologie adaptée (et consommant moins de ressources diverses) pour cet usage ou pas.
- Coté bandes de fréquences utilisées, même si la puissance de l’émission s’adapte au besoin (la portée) autant utiliser des bandes de fréquence de faible portée pour laisser les autres de libre.
- Laisser saturer les réseaux ne restreindra pas les usages, il le dégradera juste pour tout le monde le rendant inutilisable.
- Si les réseaux commencent à vraiment saturer, il va falloir se poser la question de prioriser certains flux plus que d’autres pour garder les fonctionnalités de base fonctionnelles (notre réseau mobile est d’importance stratégique au niveau national, il est primordial qu’il fonctionne correctement). Adieu la neutralité du web en France.
- Plus on laissera saturer la 4G, plus le besoin de remplacer son tel pour un modèle 5G se fera pressant. (En jetant l’ancien devenu inopérant sur son réseau saturé). Avec une 4G fonctionnelle au lancement de la 5G, les early adopters seront moins nombreux et pourront revendre leur ancien tel d’occase (au lieu de le jeter).
A noter par rapport au post ci dessus sur l’extinction des sites la nuit :
Il y a 5 ans (depuis je n’y bosse plus), il n’y avait à ma connaissance aucun site éteint la nuit chez Orange pour économiser du courant (pas même les sites expérimentaux “chers” en énergie, fonctionnant sur panneaux solaires + groupe électrogène ou pile à combustible.)
Par contre quelques sites étaient éteint la nuit pour des raisons de nuisance sonore. La ventilation et climatisation d’un site sur un toit qui consomme (et chauffe) parfois 3000W dans un espace confiné est particulièrement bruyante (et vibrante pour le bâtiment qui héberge le site).