Puisqu’on me l’a demandé, je rebondis sur la question des clips de campagnes
En préliminaire :
Le clip de campagne peut être un objectif en soi. Etant bien entendu que nous ne sommes pas franchement proches de prendre le pouvoir, tout ce que nous faisons en tant que militants sert avant tout à promouvoir des idées. Un clip de campagne, diffusé à heures de grande audience et toujours très regardé, est , du coup, un outil potentiellement très efficace. Il n’y a pas d’autre circonstance où un parti peut s’adresser à autant de concitoyens sans dépendre d’un intermédiaire médiatique.
Efficace, mais limité : le format clip TV ne permet pas de déployer une pensée un peu complexe, pour paraphraser Macron. Par contre, il peut bousculer, étonner, donner envie d’en savoir plus… nous verrons qu’aucun des clips pirates n’a jamais vraiment rempli cet objectif.
Les clips de 2012
Ils sont super technos et super chiants. Le fait est que l’équipe élection a fait ce qu’elle a pu : personne au parti pirate n’imaginait deux mois avant que le Parti serait en capacité d’aligner les 75 candidats qui donnent droit au clip. Il a donc fallu imaginer un texte et partir sur une mise en scène super basique : la majorité des pirates ont l’air un peu absents, normal ils lisent le texte sur un prompteur.
Il y a eu une tentative assez méritoire de parler de vraies questions, de dire des choses un peu pertinentes sur notre programme (passablement confus, d’ailleurs, à l’époque). Mais l’ensemble est peu digeste et souvent maladroit. Le pire, sans doute, est que la forme très magistrale de pirates assénant une vérité aux téléspectateurs est finalement assez inverse du fond qui était défendu à cette époque où les pirates étaient les seuls à promouvoir une démocratie un peu plus réellement participative.
Une fois de plus, vues les circonstances, c’était pas évident de faire mieux.
Les clips de 2014
(il y en avait un deuxième, un peu mieux, mais j’arrive plus à mettre la main dessus)
Sur celui là j’ai été beaucoup impliqué, un peu à l’insu de mon plein gré, si je puis dire. Il devait être géré par une section régionale mais ça n’a pas été le cas. La section IDF sortait d’un méga coup de chaud avec deux listes fantômes à sortir de notre chapeau, justement pour que le Parti Pirate ait le droit à son clip de campagne. Et boum, pratiquement le mercredi pour le vendredi on m’explique qu’il faut que je m’occupe de sortir un clip de mon chapeau parce que l’équipe de France TV est dispo le vendredi et pas un autre jour.
Le vendredi donc, après avoir trouvé un appart, je me retrouve devant une réalisatrice et sa team en attendant que des textes et des images me viennent de région. Ca a été de l’impro totale. Je suis encore mort de honte en m’en souvenant. Depuis deux ans on savait qu’on allait tourner ce clip et on avait pas été fichus d’anticiper.
Mine de rien, l’équipe de France TV a été suffisamment pro pour nous rattraper d’un naufrage qui aurait été mérité. Mais fondamentalement, le résultat est pas terrible. Scolaire, lourd, ennuyeux. Faire de la politique autrement, ça doit vouloir dire des formes un peu nouvelles.
Les clips de 2017
Le clip non officiel
Le clip officiel
Pour cela, quelque part, j’ai moins de regret. Il nous est arrivé la mésaventure exactement inverse qu’en 2014 : on a anticipé mais , pas de bol, on a pas eu le droit à un clip pirate, alors qu’on était persuadés que si. Du coup, il a fallu composer avec Caisse Claire et abandonner le premier projet, plus tranchant et plus ambitieux (mais raté).
Le clip Caisse Claire est correctement tourné, ce qui change par rapport à 2012. Mais il est d’un ennui sans nom et à force de consensuel, à une période saturée d’information, il vire complètement à l’anecdotique. La soupe de logo finale est en soi un échec : on n’y retient rien.
Le clip non officiel a donné lieu à des échanges assez vifs et à pas mal de frustrations pour tout le monde. Regardons le avec près d’un an de distance : force est de constater qu’il ne fonctionne pas. Non pas, comme il a pu être dit à l’époque parce que le son est mal enregistré : on peut très bien faire de très bonnes choses avec une image et un son crades. Mais parce qu’il n’a pas de cohérence, ni dans le fond, ni dans la forme. Les images sont disparates : parfois très léchées, parfois beaucoup plus rudes. On passe d’un univers métaphorique et un peu niais à une saynète réaliste maladroite. C’est confus. Faut pas être confus.
Par contre, il y a, dedans, l’unique séquence à sauver des six vidéos sur cinq ans : le moment où des gens variés, dans des appartements variés, prennent leurs téléviseurs variés et les foutent d’un même geste par la fenêtre, ça, objectivement, c’est fort. Et le mec qui après avoir dégagé sa télé regarde le poste éclaté sur le trottoir et se barre, c’est fort. C’est fort si et seulement si c’est diffusé à la télé pendant une campagne nationale. C’est fort et c’est pirate.
Donc pour finir, si on estime qu’il faut faire un clip vidéo avec des moyens et diffusés à une large audience, j’insiste, les européennes peuvent très bien ne nous servir qu’à ça. Mais cette fois, il faudrait le réussir. J’ai plusieurs éléments à suggérer mais j’ai déjà beaucoup écrit et si ça vous dit, je les livrerai dans un autre post.