Loi Duplomb et acétamipride

Objectifs du post

Ce post à pour objectif de faire un récapitulatif de ce que l’on sait à l’instant T sur la loi Duplomb adoptée à l’AN hier Mardi 8 Juillet 2025. Depuis l’adoption, et même avant, les deux « camps » s’empoignent violemment au sujet de cette loi :

  • Soit on a le côté des « empoisonneurs d’enfants », « entreprises écocides », « lobbys agro-alimentaires » et consort qui sont pour
  • Soit le côté des « couillons déconnectés d’écolos qui veulent voir crever les agriculteurs français » qui sont contre

Je paraphrase évidemment, mais vous avez l’idée (et certaines de ces takes sont verbatim).

Le débat cristallise globalement autour de l’acétamipride, un insecticide néonicotinoïde, mais la loi implique d’autres changement également attaqués comme la facilitation d’installation de méga-bassines.

Afin d’avoir une position pirate tenable et en accord avec nos propositions sur l’agriculture, je propose ici un rapide rappel de ce que j’ai compris du contexte et des enjeux autours de l’acétamipride, ainsi que ma position sur la question. Des sources sont dispo en bas.

Notes de lecture

Les références sont en forme de footnote quand utilisées la première fois, citées entre crochets pour les suivantes.

J’ai également utilisé ChatGPT à plusieurs endroit dans ma rédaction, notamment pour de la reformulation et la recherche de sources. Pour autant, ce post est issu majoritairement de mon propre jus de cerveau, même si ça m’a fait gagné un temps fou. Les sources ont été relues après coup, pas d’inquiétude à avoir de ce côté.

Contexte et contenu de la loi Duplomb :

La proposition de loi Duplomb (portée par les sénateurs LR Laurent Duplomb et Franck Menonville) a été adoptée définitivement le 8 juillet 2025. Son objectif affiché est de « lever les contraintes » pesant sur l’agriculture (irrigation, élevages, etc.). Le texte contient plusieurs mesures de simplification, mais la plus controversée est la réintroduction encadrée de l’acétamipride – un insecticide néonicotinoïde jusqu’alors interdit en France depuis 2018. La mesure prévoit que, par décret et en dernier recours, l’acétamipride pourra être utilisé « pour faire face à une menace grave compromettant la production agricole » lorsqu’aucune alternative satisfaisante n’est disponible.
Un comité de suivi devra réexaminer la situation au bout de trois ans (avec révision annuelle) pour vérifier les critères d’autorisation. Parallèlement, le texte relève les seuils d’autorisation environnementale pour certains bâtiments d’élevage et assouplit les procédures de stockage d’eau pour l’irrigation, afin de pallier la raréfaction des ressources hydriques due au changement climatique.

La Confédération paysanne qualifiait la mesure de « mortifère pour le vivant et la santé », tandis que la FNSEA la jugeait au contraire « vitale » pour les agriculteurs. Le texte a été soutenu par la majorité des parlementaires (316 voix pour, 223 contre) et par le gouvernement, devant un front d’opposition de la gauche et des écologistes. [1] [2]

L’acétamipride en question

Usages agricoles et efficacité

L’acétamipride est un insecticide systémique de la famille des néonicotinoïdes. Absorbé par la plante (en traitement de semences ou foliaire), il se diffuse dans toutes les parties vivantes (racines, tiges, feuilles, fleurs) pour tuer les insectes ravageurs qui s’en nourrissent[3].
C’est un produit à large spectre ; les agriculteurs qui l’emploient le considèrent comme la seule substance vraiment efficace contre le puceron vert (Myzus persicae), vecteur de la jaunisse en betterave sucrière. En 2020, sans cette protection, ce puceron avait causé des ravages considérables (pertes de 40–50 % du rendement de betterave dans certains cas)[4].

Les producteurs de betteraves ou de noisettes – filières les plus concernées – affirment n’avoir aujourd’hui aucune autre solution vraiment efficace pour contrôler ce ravageur. Ils redoutent que l’absence de néonicotinoïdes en France ne les place en situation de « concurrence déloyale » vis-à-vis de pays voisins qui continuent de les utiliser [5]. Pour eux, la loi Duplomb rétablirait l’égalité de traitement avec le reste de l’Union européenne (l’acétamipride étant autorisé au niveau européen jusqu’en 2033).

Risques pour les pollinisateurs et la biodiversité

À l’inverse, les défenseurs de l’environnement s’alarment de la toxicité de l’acétamipride pour les abeilles et la faune non cible. Bien que moins toxique que certains autres néonics, cette substance a des effets systémiques et persistants qui la rendent dangereuse. Des études montreraient qu’elle est très persistante dans l’eau et les sols : sa demi-vie dans l’eau pourrait atteindre 79–80 jours[6], et selon des chercheurs elle reste active dans les sols « plusieurs décennies » après application.

En pratique, même si l’acétamipride ne tue pas toujours les abeilles sur-le-champ, il perturbe fortement leur comportement (apprentissage, repères, instint de recolonisation) et réduit la viabilité des colonies[7].

D’après l’INRAE, ses effets « non intentionnels » sur les pollinisateurs sont désormais « clairement documentés » et ont un impact en cascade sur l’écosystème (chute des populations d’insectes, puis d’oiseaux insectivores)[8].

C’est pourquoi les apiculteurs et associations écologistes qualifient son retour de « tueur d’abeilles » et le considèrent comme un « désastre » pour la biodiversité[9].

Par ailleurs, des recherches indiquent que l’exposition aux néonicotinoïdes, y compris l’acétamipride, peut affecter d’autres animaux sauvages (ex. invertébrés aquatiques) et contaminer les eaux souterraines, aggravant la pollution des écosystèmes.

Risques pour la santé humaine

Du côté de la santé humaine, le bilan est contrasté. L’ANSES (autorité sanitaire française) avait conclu en 2016–2017 qu’aucune étude n’avait permis de mettre en évidence un effet nocif sur l’humain dans des conditions d’usage réglementaire[10].

Historiquement, l’acétamipride a été considéré comme peu toxique pour les mammifères comparé aux néonics plus anciens. Toutefois, l’EFSA (autorité européenne) a rappelé en 2024 qu’il subsiste de fortes incertitudes sur son potentiel neurotoxique, en particulier pour le développement neurologique des fœtus et enfants.

Sur la base des nouvelles données, l’EFSA a recommandé d’abaisser fortement les doses journalières admissibles (0,025 à 0,005 mg/kg) et a identifié que les résidus actuels dans certaines denrées pourraient poser un risque sanitaire.

Une étude animale récente (2022) a en effet suggéré un lien de causalité entre l’acétamipride et certains cancers chez la souris, bien qu’aucune donnée équivalente n’ait encore été observée chez l’humain aux faibles doses environnementales.

Enfin, comme tout pesticide, l’acétamipride peut provoquer en cas d’exposition aiguë accidentelle (ex. ingestion massive) des symptômes neurotoxiques graves (nausées, vomissements, convulsions), mais ces cas restent rares et relèvent davantage de la toxicologie professionnelle. En synthèse, la littérature scientifique souligne la nécessité de prudence et de limiter autant que possible l’exposition chronique, même si le niveau exact de risque pour l’homme n’est pas définitivement établi[11][12].

Bénéfices économiques vs coûts sanitaires et environnementaux

Les partisans de la mesure mettent en avant les avantages économiques attendus : protection des rendements, compétitivité des filières agricoles et souveraineté alimentaire. Sans l’acétamipride, ils craignent des pertes de récolte massives et l’invasion de parasites difficiles à contrôler par ailleurs.

Par exemple, en 2020 l’absence de néonicotinoïdes autorisés avait coïncidé avec une grave épidémie de pucerons sur betteraves, estimée pouvoir réduire les rendements de 40–50 %. La filière sucrière, qui a déjà vu un appel à l’aide fin 2020 (autorisation de traitements dérogatoires), a mis en garde contre le risque de « décapitaliser » la production française au profit d’importations moins contrôlées. Les partisans estiment que l’autorisation encadrée redonnerait aux agriculteurs français des moyens équivalents à ceux de leurs homologues européens, évitant une concurrence jugée déloyale [Le Monde, Plein Champ].

En revanche, les coûts indirects – sanitaires, environnementaux, socio-économiques – restent difficiles à chiffrer précisément mais sont jugés potentiellement élevés par les opposants. Ils incluent notamment la dégradation du service de pollinisation (impactant toutes les cultures), la baisse possible de la production de miel (qui avait déjà chuté après l’utilisation des premiers néonicotinoïdes dans les années 1990, et l’effet en cascade sur la biodiversité [Le Monde].

Sur la santé publique, plusieurs études (dont un rapport de l’Inserm en 2021) ont montré une augmentation des pathologies liées aux pesticides chez les agriculteurs et leurs enfants, et suggèrent des coûts élevés en maladies chroniques à long terme.

Par exemple, France Nature Environnement estime que la pollution par les pesticides cause des milliers de décès prématurés et milliards d’euros de dépenses de santé (sur l’ensemble des pesticides, pas uniquement les néonics). La loi Duplomb instaure une clause de revoyure à trois ans pour vérifier l’impact de ces réautorisations et évaluer si les critères de risque demeurent acceptables. Toutefois, certains groupes environnementaux dénoncent une vigilance insuffisante, craignant que cette « revoyure » ne soit qu’une formalité et permette finalement de réutiliser très largement ces substances à long terme[13].

Alternatives aux néonicotinoïdes

Plusieurs études françaises et européennes montrent que des solutions de remplacement aux néonicotinoïdes existent déjà ou sont en développement. Une expertise de l’ANSES (2021) dédiée à la betterave sucrière a recensé 22 méthodes alternatives pour lutter contre les pucerons vecteurs du virus de la jaunisse.

Cela inclut quatre options immédiatement utilisables (deux insecticides classiques autorisés sur betterave, et deux pratiques culturales – paillage des rangs et fertilisation organique azotée).

Dix-huit autres moyens (insecticides d’autres familles, biocontrôles, variétés résistantes, pulvérisations de micro-organismes, huiles végétales protectrices, stimulation des défenses naturelles, cultures associées…) pourraient devenir disponibles sous 2–3 ans[14].

L’ANSES souligne que ces solutions seules ont une efficacité partielle; elles devront être combinées dans un système de lutte intégrée pour atteindre un contrôle satisfaisant.

D’une manière plus générale, l’INRAE relève qu’une alternative efficace aux néonicotinoïdes existe dans 96 % des cas d’usage étudiés.

En pratique toutefois, 89 % des agriculteurs ayant abandonné les néonics ont simplement remplacé leur usage par un autre insecticide chimique (souvent une pyréthrinoïde). Les méthodes non-chimiques sont disponibles dans 78 % des situations étudiées: cela inclut la lutte biologique (prédateurs ou parasitoïdes naturels, microorganismes entomopathogènes), l’utilisation de phéromones ou d’autres attractifs (confusion sexuelle, pièges), ou encore le recours aux huiles de surface qui asphyxient physiquement les ravageurs.

Ces approches non chimiques sont particulièrement viables pour lutter contre les ravageurs aériens (chenilles, pucerons, thrips, etc.), tandis qu’elles restent plus limitées contre les organismes s’attaquant aux racines ou troncs.

De nouvelles solutions sont en cours de recherche : par exemple, des variétés végétales plus résistantes, des dispositifs de piégeage optimisés, des insecticides biobasés ou des micro-organismes, etc. L’INRAE note toutefois que beaucoup de ces solutions prometteuses sont aujourd’hui coûteuses (marché de niche) et nécessitent un soutien financier/public pour se développer[15].

En résumé, les alternatives abondent mais leur adoption reste freinée par des coûts élevés (biopesticides souvent plus chers) et par l’inertie des pratiques : une grande coordination entre la recherche, les filières agricoles, les pouvoirs publics et les agriculteurs est requise pour mettre en œuvre des systèmes de protection des cultures viables sans néonicotinoïdes.

Ma compréhension

Le sujet cristallise et à raison. Cependant, je ne saurais que trop rappeler qu’il faut savoir raison garder sur les sujets aussi brûlants; les néonicotinoïdes sont certes néfastes à plusieurs échelles, pour le moment les études montrent des résultats hyper variés suivant les méthodes et seuils d’analyses utilisés. À ce titre, nous manquons vraiment d’études et de recherche singeant les modes d’utilisation des dits produits afin d’en mesurer précisément les effets court et long termes dans les conditions d’utilisations fixés par les lois françaises et européennes (et globalement cela vaut pour la plupart des substances).

Les alternatives existent aussi, mais l’adoption est lente. Dans ce contexte, faire la transition de manière progressive paraît une bonne chose + les révisions à 3 ans des impacts réels de la réintroduction paraît aussi être un bon moyen de s’assurer que les dégâts supposés sont bien réels. Si j’étais moi même député j’aurais plutôt dit que 3 ans c’est trop, et qu’une étude annuelle était plus indiquée. Peut être que l’adaptation de la dose et de la manière d’administrer serait indiquée plutôt que laisser faire et ré-interdire en bloc sans nuance.

De manière générale, les conclusions sur les impacts éco-systémiques ont des variances extrêmes (certaines conclusions pointent quelques jours de demie vie, d’autres 70 jours, et on a même certains qui affirment « des dizaines d’années »). La vérité doit certainement se trouver quelque part la dedans, mais qui dit le bon truc ? Une étude approfondie doit être faite (et on a pas les compétences pour ça). D’ici là, on peut pas dire grand chose.

Pour le reste, les débats autours des méga-bassines c’est du classique, sur l’élevage intensif y’a des trucs à dire aussi.

Un dernier point quand même : la filière sucrière notamment attaque vivement les « anti » de cette loi, car la « survie » de la filière en dépend presque. Attention, le lobby derrière est un poil puissant (comme celui des céréaliers par ailleurs, l’Aube c’est une terre de betterave et de céréales, super…) Pour autant, je suis fondamentalement contre maintenir sous perfusion une filière qui serait vouée à l’échec si nos modes de consommations évoluaient : i.e. vers moins de sucre partout. Les agris pourraient se retourner vers des productions autres et viables, les terres agricoles vont pas disparaître, mais la nécessité de la culture de la betterave et donc de l’usage de néonicotinoïdes comme celui dont il est question serait grandement remise en question.

Le débat sur les pratiques agricoles interroge donc directement nos consommations personnelles et surtout les produits qui nous sont offerts à la consommation. En France et plus largement en Europe on est majoritairement épargné par les ravages de l’ultra-transformé et sucré, mais c’est pas la panacée. Attaquer ces modes de consommation en permettant aux agri de produire des denrées vendables en magasins au bénéfice de tous plutôt que de la betterave à sucre par exemple est pour moi la meilleure des choses à faire dans des contextes pareils. Attention toutefois, le changement de prod ne règle pas le problème des ravageurs pour autant.

Si vous avez des remarques, réflexions ou autres, lancez vous, c’est le moment :smiley:

Références


  1. ↩︎

  2. ↩︎

  3. https://www.cnews.fr/france/2025-07-08/loi-duplomb-quest-ce-que-lacetamipride-ce-pesticide-interdit-depuis-2018-mais-que ↩︎

  4. ↩︎

  5. ↩︎

  6. ↩︎

  7. ↩︎

  8. ↩︎

  9. ↩︎

  10. ↩︎

  11. ↩︎

  12. ↩︎

  13. ↩︎

  14. ↩︎

  15. ↩︎

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Notes : les références de bas de page sont en fait intégrée au texte contrairement à la preview… Du coup la section références ne sert à rien, et mes remarque au début non plus. Désolé si ça a pu introduire une confusion pour certains.

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Ce qui complique les choses, c’est que sous le terme « agriculture » on a deux systemes de production très differents : l’agroalimentaire (FNSEA) et les agriculteurs
La FNSEA est souvent le porte voix auprès de nos élus mais les autres fédérations ne sont pas nécessairement d’accord avec elle :

Les agriculteurs sont globalement indissociables de l’agro-alimentaire. Si ce que tu sous entends c’est d’un côté les producteurs à destination de " l’industrie" et de l’autre les producteurs « alternatifs » (je met des gros guillemets parce que les agriculteurs sont plutôt difficiles à catégoriser de manière aussi binaire), alors on peut peut être s’accorder sur le fait que oui, même dans le monde agricole il existe des divergences d’opinions et de mouvances. Mais ça ne fait pas pour autant avancer le débat dans le bon sens. La FNSEA étant l’organisation la plus influente ne veut pas dire que les autres n’existent pas. Et la confédération paysanne est également régulièrement décriée pour certaines prises de position que je qualifierais, au mieux, d’utopistes, et a elle le plus d’influence du côté de la plupart des élus « de gauche » ou écolos.

Bref, il ne s’agit pas ici de dire « tel lobby a raison » ou « il faut écouter l’autre lobby », mais plutôt d’apporter une réelle réflexion sur l’ensemble du système agricole avec les données à notre disposition. Et pour le moment, même si la règle reste à la prudence, comme pour toute les substances de synthèse utilisée dans notre agriculture, les études sont trop floue et pas assez poussée dans les conditions in vivo pour statuer sur un effet pervers et délétère à long terme sur la vie humaine. Les effets écosystémiques sont eux bien connus, d’où l’intérêt de baisser les doses journalières autorisées + de contrôler régulièrement les effets de cette réintroduction.

+comme je l’ai rappelé en fin de poste, cette loi est la parfaite occasion pour interroger de manière plus large les modes de consommation qui sont les nôtres. Si nous sommes restés particulièrement attachés à la nourriture et les plats bien préparés et maison, c’est une tendance à protéger. Si la filière sucrière industrielle a du plomb dans l’aile, il y a fort à parier que les agriculteurs participants à cette filière changeront leurs productions. Identiquement pour toutes les autres filières par ailleurs.

Je pense qu’au dela du contenu qui peut prêter a débats notamment sur les phytosanitaires et la différence entre la volonté d’un cadre et les pratiques qui l’entourent.

Il ne faut pas négliger le fond de la loi. Le conservatisme agricole , la fuite en avant dans un système de production qui a pu être efficace dans un premier temps mais qui stagne et se heurte a ses limites, le patriotisme de poussière qui ne vise qu’à pousser en avant un système agricole uniformisé, agregé dans des groupes productivistes.

Effectivement c’est une question qui serait intéressante d’être débattue. Devant la chute du nombre de paysan, la médiocrité de la plupart de leurs revenus voulons nous continuer dans cette voie ou avec pragmatisme nous pouvons regarder ce qui a mené a cette d’échéance du métier ? Et faire en sorte inverser cette tendance ?

La loi duplomb se positionne pour les grands exploitants/éleveurs capable d’inonder un marché international avec l’inconséquence du lendemain. Produire pour jeter, c’est encore une réalité tout au long de la chaîne de production et distribution. (même si les ménages représentent une part non négligeable ) . Le mythe de la corne d’abondance.

Bref je commence à m’égarer, mais la moo duplomb ce n’est pas qu’une question de pesticides bon ou mauvais.

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C’est en effet la question qui sous-tend ces débats : dans quelle direction voulons-nous faire évoluer notre agriculture ? Et surtout, avec quels moyens, quelles contraintes, et quelles attentes de la société en matière de prix, de qualité et de souveraineté alimentaire. Peu importe qu’on parle ici de pesticides, d’OGM, ou de retenues d’eau, le problème de fond reste systémique.

Je ne suis pas totalement d’accord. Il me semble trop simple d’opposer « grands exploitants productivistes » à un modèle « paysan » idéalisé. Les agriculteurs français, toutes tailles confondues, sont soumis à une pression économique intenable, sur un marché mondialisé où leurs marges s’effondrent. Beaucoup se retrouvent coincés dans un modèle qu’ils n’ont pas choisi, pris en étau entre les injonctions politiques, les attentes sociétales, et la réalité économique.

Qui, aujourd’hui, peut vraiment prétendre consommer uniquement du local, produit avec des pratiques exemplaires, et à un coût juste pour l’agriculteur ? En dehors de quelques privilégiés, très peu. Et c’est là tout le nœud du problème : si l’on interdit les leviers (produits phytos, variétés OGM, optimisation hydrique…) qui permettent de maintenir une production abondante et relativement peu coûteuse, on ne réduit pas la consommation, on la déplace. @Roscoe l’a justement rappelé : à consommation constante, moins de production en France = plus d’importations, souvent (pour ne pas dire systématiquement) avec des standards moindres.

Les agriculteurs ne sont pas les instigateurs d’un système mortifère, ils en sont bien souvent les premières victimes. Et il me semble qu’on pourrait tout à fait discuter de sa réforme en profondeur sans faire des lois comme Duplomb des preuves d’une soumission devant les lobbys.

D’ailleurs, il ne faut pas oublier que les autorisations de pesticides permises par cette loi restent très encadrées, et qu’en l’état, la France applique des normes parmi les plus strictes au monde en matière de sécurité alimentaire. L’acétamipride est autorisé par l’Union européenne jusqu’en 2033, et les niveaux de résidus autorisés restent très largement en dessous des seuils de dangerosité de manière générale. On est loin des pratiques autorisées ailleurs, notamment dans les pays d’Amérique ou d’Asie du Sud. Ce que permet cette loi, ce n’est pas de noyer nos champs sous les phytos, c’est de conserver ponctuellement un levier pour éviter l’effondrement de certaines productions, sans remettre en cause la qualité sanitaire des aliments produits d’une part, et en évitant justement l’import de denrées alimentaires provenant d’exploitations justement noyées sous les phytos d’autre part.

À mon sens, ce type de loi ne résout rien au niveau du système, mais elle ne mérite pas non plus un procès d’intention trop rapide. Elle tente de garder à flot une agriculture sous perfusion, avec des outils discutables mais dans un contexte difficile. Le vrai chantier est ailleurs : quelle politique agricole, quel modèle économique, et quelle cohérence entre ce que la société attend et ce qu’elle accepte de payer.

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Nous avons des tendances divergentes : agroalimentaire promoteur de la loi, agriculteurs (certains pour et d’autres contre), santé contre le cancer… et tout ça dans un contexte de concurrence mondiale, principalement sur les oléagineux, concurrence qui ne se fait pas avec les mêmes règles et donc avec un possible désavantage économique à l’exportation (surtout avec Trump).
Si les citoyens devaient voter la loi dans ce contexte (dans le cadre d’un référendum, par ex.), nous voterions 3 ou 4 tendances différentes en un seul vote, ce qui revient à faire gagner la tendance qui regroupe le plus grand nombre de citoyens : je parie pour « éviter l’accroissement du nombre de cancers », parce que tout le monde se sentira concerné à rester en bonne santé

Je parie plutôt pour " éviter l’augmentation du prix de la nourriture ". Les gens sont certes concerné par leur santé future, mais encore plus par leur porte monnaie actuel…

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En conséquence, on aurait des prix raisonnables, avec ensuite, plus tard, des cancers déraisonnables.
J’imagine ce qui se passerait si on aboutissait à une « pandémie » de cancers…

Assurons‑nous bien du fait, avant que de nous inquiéter de la cause. Il est vrai que cette méthode est bien lente pour la plupart des gens, qui courent naturellement à la cause, et passent par‑dessus la vérité du fait ; mais enfin nous éviterons le ridicule d’avoir trouvé la cause de ce qui n’est point.

@Phnac tu parles de quels cancers exactement ?

Peut on encore autoriser l’alcool pour le population?

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Je jure que j’ai essayé de contenir mon énervement jusqu’ici.
Vraiment. J’ai lu, j’ai relu, j’ai tenté de garder un ton posé.
J’ai fait le travail de compilation de sources, contradictoires qui plus est. Je suis allé voir les sources primaires, les études, les blogs, les pamphlets.
Mais devant ce niveau de simplisme, cette avalanche de mots-clés anxiogènes balancés sans source ni nuance – “les pandémies de cancers", “les lobbys” – je craque.

Franchement, faut arrêter avec cette ritournelle apocalyptique digne d’un sketch mal écrit.
« Les cancers, les enfants empoisonnés, les méchants lobbys, empoisonnement délibéré mais en prenant au hasard les citoyens. TERRORISME » Sérieusement ?
C’est quoi l’étape suivante ? « Big Agro met du Roundup dans les biberons pendant que les députés touchent des valises pleines de billets ? »

C’est pas un débat, c’est une pièce de théâtre. Mal jouée, mal sourcée, mal pensée.
Parce que pendant qu’on dénonce à grands cris “la mort dans les champs”, y’a des gens qui produisent, des gens qui mangent et des gens qui crèvent économiquement. Mais bon, c’est sûr que c’est plus facile de crier “empoisonneurs !” que de se coltiner la complexité d’un système agricole à bout de souffle.

Alors remettons deux-trois trucs à leur place :

  • L’acétamipride est autorisé au niveau européen jusqu’en 2033, sur la base d’évaluations scientifiques.
  • Les résidus alimentaires en France sont parmi les plus bas du monde.
  • La loi Duplomb, avec toutes ses limites, n’autorise pas l’usage massif et aveugle, elle prévient une impasse technique sur certaines cultures, en attendant mieux.

Mais évidemment, il faut un méchant. Alors on invoque “les lobbys”. Sans se demander si, par hasard, les vraies victimes du système ne seraient pas les agriculteurs eux-mêmes, coincés entre des charges délirantes, des prix au ras du sol, des injonctions contradictoires, et un mépris poli de ceux qui leur expliquent, depuis leurs salons chauffés, comment produire « proprement ».

Et pendant qu’on moralise à longueur de commentaire, il faut aussi parler des consommateurs.
Parce qu’eux non plus n’ont pas les moyens d’acheter 100 % local, bio, vertueux et de saison.
Ils sont aussi pris dans l’étau économique. Pas “complices”, mais otages d’un système qui impose le prix comme unique critère de survie, pour remplir un caddie sans finir dans le rouge. Et ce n’est pas en leur donnant des leçons de vertu qu’on changera quoi que ce soit.

Alors non, la loi Duplomb n’est pas la panacée. Elle est probablement mal fichue sur plein d’aspects.
Mais elle n’est pas non plus le pacte faustien entre Satan et la FNSEA qu’on essaie de nous vendre à grand coup de tirades moralisatrice en invoquant les cancers de nos chères petites têtes blondes.

Si on veut changer le système, il va falloir autre chose qu’un concours de slogans.
Il va falloir un peu de rigueur, un peu de mémoire, un peu de courage.
Et surtout, un peu moins de confort dans l’indignation facile.

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Désolé d’avoir généré cette réaction. Lorsque j’ai dit pandémie de cancer, c’était dans le sens imaginons la réaction des citoyens qui constatent une augmentation du nombre de cancer (en fait, il y en a une, mais actuellement, elle est due au vieillissement de la population)
Concernant les « méchants » il faut bien avouer que l’on a un historique : le plus célèbre est Philip Morris, la viande de cheval 2013, les œufs au fipronil 2017, Nestlé waters en ce moment (et couvert par le gouvernement)…

Merci de mettre en avant qu’une vision différente de la.politique de fond d’une loi reste une vision trop simple du monde cela fait toujours plaisir à lire.

Ceci étant dit aucun argument que tu as mis en avant ne contredit mes propos.

La pression économique voulu par la distribution ou le système d’exploitation qui consiste à produire plus / mieux pour moins cher afin d’obtenir une plus value qui ne se restitue pas aux fournisseurs de matières premières. Ce n’est pas une vue de l’esprit. Car la seule variable d’ajustement sera le prix du travail ou la qualité final du service. Et nous pourrions faire analogie avec la décrépitude du financement publique de la santé .

Pour les agriculteurs je veux bien aussi qu’on en est une version idéaliste car elle existe pour la majorité, mais faut aussi s’ancrer dans la réalité une partie en a rien a foutre de la qualité du produit fourni. Et c’est d’autant plus vrai quand ton exploitation fait face a un cours monétaire sur la valeur de ta production et que tu es detachée de la délivrance finale.

Il ne faut pas oublier la politique du pied dans la porte qui est trop souvent utilisé en France. On s’en émeut et nous luttons sur le numérique mais soudain nous serions tres responsable sur le secteur agricole.

Sinon l’argument des riches je veux bien l’entendre entre un nourriture ultratransformé peu chère et les fruits légumes et produit peu transformé . Mais c’est un état de fait uniquement dans ce sens qui se constate au sein même d’un supermarché.

Bref je ne dis pas que la fnsea = pourri , ni que cette loi est un objet impie. Mais il ne faut pas aussi donner un blanc-seing a des gouvernements et des systèmes qui sont a origine de plusieurs scandales.

En 2020 nous avions écrit l’article suivant : Parti Pirate - Néonicotinoïdes : Les betteraves de la colère
, je me demande dans quelle mesure il est toujours d’actualité.

Ce que je trouve vraiment intéressant aujourd’hui, c’est la pétition contre cette loi à l’assemblée nationale qui compte déjà plus de 1.3 millions de signatures. Il y a un effet « buzz » évident, mais on peut y voir aussi un intérêt nouveau pour une démocratie plus directe - l’état de délabrement actuel des institutions du pays aidant.
La question des pétitions n’est pas nouvelle ici, voir par exemple ce sujet. En parallèle, je trouve que c’est aussi l’évolution des outils numériques, et plus précisément France Connect, qui pourrait nous inspirer sur les possibilités de gouvernance étendue avec ce genre de système :wink:

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