Quant à la PAC, je ne la connais pas suffisamment pour pouvoir en faire une analyse fine, cependant, il y a des limites, qui freinent en partie les pratiques. L’exemple que je vois, c’est le fait de ne pas avoir le droit d’utiliser un herbicide en post-semis/pré-levée (typiquement, du glypho). Je m’explique :
En agriculture de conservation, on alterne des cultures de vente ou de rente (qu’on vend, ou qu’on donne à manger à son troupeau, dans tous les cas, qu’on récolte, qui sortent de la parcelle : on dit qu’on “exporte de la parcelle”) et des cultures qui sont là pour la fertilité du sol, pour limiter l’érosion, pour favoriser les auxiliaires des cultures, pour structurer le sol etc. Il y a plein de raisons de faire pousser ces cultures dont on ne tire pas profit : on appelle ça des Cultures Intermédiaires Multi Services (des CIMS).
Le glyphosate est un herbicide qui pénètre par les feuilles : pas de feuilles, pas de risque de détruire la culture (donc, si on met du glypho en préventif, pour ne pas que ça repousse : ça ne sert à rien).
Quand on plante une graine, on la plante à quelques cm de profondeur (ça varie selon les cultures). Au début, elle n’a pas de feuilles. Je peux donc passer du glyphosate juste après le semis de la culture de vente pour détruire ma culture intermédiaire : ça ne porte pas préjudice à ma culture de vente.
Or, en agriculture de conservation, il est fréquent (et ça présente plein d’avantages) qu’on sème la culture de vente dans le couvert (=dans la culture intermédiaire) Vidéo de semis direct de maïs dans un couvert de féverole, 1min30, juste pour visualiser. Et souvent, malgré le fait que beaucoup d’agriculteurs en agriculture de conservation aimeraient s’en passer, on desherbe avec un glypho, le jour du semis ou quelques jours après.
C’est interdit par la PAC, car un technocrate a considéré que si on passait du glyphosate entre le semis et la récolte de la culture, ça voulait dire que la culture résistait au glyphosate et que donc, c’était un OGM. Or non, il y a cette petite fenêtre de quelques jours, où la culture est semée, n’a pas encore de feuilles visibles, et où elle est donc insensible au glyphosate. C’est juste un exemple pour illustrer certains aspects non pertinents de la PAC.
Pour contrecarrer ça, on trouve des “solutions” : déclarer qu’on a traité trois jours plus tôt plutôt que trois jours plus tard, invérifiable ou bien détruire le couvert bien avant le semis, mais l’intérêt agronomique voudrait qu’on ait une destruction la plus tardive possible, pour maximiser les effets positifs du couvert intermédiaire (=culture intermédiaire, c’est pareil).
Sauf que là, attention, on n’a pas le droit de détruire une culture intermédiaire avec du glyphosate, mais en revanche, on a le droit de nettoyer sa parcelle avant l’implantation de la culture de vente avec du glyphosate : l’acte est le même, la façon de le déclarer fait qu’on est dans la légalité (ou pas).
La PAC ne permet pas non plus la prise en compte des cultures associées sur une parcelle. Pour la PAC : une parcelle = 1 et 1 seule culture. Or, il est possible de faire pousser plusieurs espèces sur une même parcelle : des arbres et une culture annuelle (c’est l’agroforesterie), plusieurs espèces annuelles ensemble, soit du début à la fin, soit sur une partie seulement de la croissance de la plante (“relay-cropping”). ça présente des avantages agronomiques (notamment : pas de sol nu = moins d’adventices (~"mauvaises herbes) = moins d’herbicides), mais le fait que ça ne soit pas pris en compte par la PAC, ça fait qu’on ne touche pas d’aides pour ces pratiques.
En conclusion, excusez-moi pour le pavé. Je pense qu’il y a beaucoup de choses à changer dans la PAC, je vous ai présenté deux exemples, mais je ne connais pas suffisamment la PAC pour pouvoir aller beaucoup plus loin que ça :s