#SaveYourInternet : réponse de Marc Joulaud

Hello,
Tous ceux qui, comme moi, ont utilisé l’envoi de mail de https://saveyourinternet.eu/fr/ ont dû recevoir ou vont recevoir la réponse automatisé de Marc Joulaud, eurodéputé LR et très partisan de la réforme du copyright.
L’argumentaire qui nous est opposé est précis mais esquive soigneusement de répondre aux questions qui fâchent. Pour le déconstruire, il va falloir être précis également, ce qui ne signifie pas nécessairement être technocratique ou chiant.
Je donne à qui le souhaite en MP l’adresse d’un pad privé qui ne se fera pas pourrir par les trolls et où on peut bosser une réponse.

Chère Madame, Cher Monsieur,

Merci pour votre email.

Tout comme vous, je suis très attaché aux libertés et à internet. Je travaille sur le droit d’auteur depuis le début de mon mandat et j’ai participé aux négociations sur la Directive réformant le droit d’auteur. J’ai toujours défendu que consommateurs et auteurs ne sont pas ennemis, chacun a besoin de l’autre. C’est pourquoi j’ai œuvré pour que ce texte soit équilibré, pour répondre aux défis du numérique sans menacer les droits des citoyens.

La réforme du droit d’auteur votée en commission des affaires juridiques a mon soutien plein et entier. Je renouvellerai avec conviction ce soutien lors de la prochaine session plénière. Internet doit rester libre, mais cela ne veut pas dire que les règles ne s’y appliquent pas. Les choses peuvent paraitres plus simples quand il n’y a pas de règles, mais elles ne sont jamais justes.

De la taxation au droit d’auteur, les abus des plateformes sont généralisés. Elles ne rendent de comptes à personne et fonctionnent selon la loi du plus fort.

Aujourd’hui ces plateformes manipulent une incertitude juridique pour se dire complètement irresponsables de ce qui se passe sur leurs services, tout en se servant activement du contenu comme d’un appât pour collecter des données personnelles et des revenus publicitaires. Elles refusent de négocier avec les auteurs dont elles exploitent le contenu ou leur imposent des rémunérations de l’ordre du pourboire.

Il suffit de comparer la différence entre Spotify, qui passe des accords avec les auteurs, et Youtube, qui impose sa loi. Spotify, avec ses 70 millions d’abonnés, rémunère 20 fois plus les auteurs que Youtube, qui compte 1,5 milliards d’utilisateurs mensuels !

C’est pourquoi l’Union européenne veut définir un cadre pour les relations entre les acteurs économiques que sont les plateformes et les auteurs, pour s’assurer que tous se retrouvent à la table des négociations et discutent d’égal à égal.

Les plateformes conçues pour permettre à leurs utilisateurs de mettre en ligne du contenu protégé et qui optimisent ce contenu, notamment pour en tirer profit, devront accepter de passer des accords justes avec les auteurs. La Directive exclue spécifiquement les autres types de services, qui soit ont un rôle passif, soit sont de nature non-commerciale.

L’immense majorité des services sur internet ne sera donc pas affecté par cette Directive, qui est parfaitement compatible avec la législation européenne et internationale, comme l’ont confirmé tous les services juridiques des institutions européennes ainsi que de nombreux experts et juristes reconnus.

Les mesures demandées par la Directive n’obligent nullement les plateformes sur internet à se doter d’infrastructures de censure. Elle rend obligatoire pour les plateformes qui exploitent du contenu protégé de prendre des « mesures proportionnées » en coopération avec les ayant-droits. En pratique, ces mesures pourront prendre des formes très différentes, suivant les caractéristiques du service, les types de contenus concernés, etc.

Ces mesures sont nécessaires en raison de la masse d’information (400h de nouvelles vidéos chaque minute sur Youtube), qu’il est impossible pour un humain de traiter sans assistance. Cette approche est la norme dans de nombreux domaines (protection des mineurs, lutte contre le spam, lutte contre la pornographie, etc.) et a largement prouvé son efficacité.

La Directive indique clairement que les mesures devront respecter les droits de la Charte des Droits Fondamentaux (qui intègre aussi la protection du droit d’auteur) ainsi que les exceptions au droit d’auteur (citation, parodie, information, etc.) et interdit que ces mesures mènent à une surveillance généralisée.

En effet, ces mesures ne pourront être appliquées uniquement pour des œuvres spécifiquement identifiées, et pour lesquelles les ayants-droit auront transmis les données détaillées aux plateformes. Une mesure ne rentrera en action que si un contenu correspond à 100% à l’œuvre fournie par l’ayant-droit. Et si une erreur survient, les consommateurs pourront utiliser un mécanisme simple permettant de faire rétablir leur contenu.

La Directive n’impactera pas négativement l’économie européenne, bien au contraire. La culture est l’un des derniers secteurs dans lequel l’Europe est un leader mondial. Ce secteur représente plus de 7 millions d’emplois (dont 1 million en France), soit deux fois plus que le secteur automobile. Des centaines de milliers d’artistes, en particulier les plus petits, ne demandent qu’à pouvoir vivre de leur passion.

Les obligations de la Directive devront être proportionnées et tenir compte de la taille des services concernés. On ne pourra donc pas demander la même chose à une PME qu’à Youtube. Les mesures sont déjà disponibles sur le marché, et continueront de se développer, le tout à des coûts très abordables pour les PME. Les auteurs ne sont pas satisfaits du monopole de fait des grandes plateformes, ils n’étoufferont donc pas les start-up européennes.

La censure n’est pas et ne sera jamais une mesure proportionnée, pas plus qu’elle ne fait partie des valeurs européennes. L’Europe a toujours été un leader mondial pour défendre les droits numériques des citoyens, qu’il s’agisse de neutralité du net ou encore de protection des données personnelles. Jamais l’Europe ne créera un système de censure, que beaucoup de pays européens ont subi dans leur histoire récente.

Les citoyens pourront donc librement continuer à s’exprimer, s’informer, créer et partager des mèmes, etc. L’internet libre restera libre. Mais grâce à cette réforme, il sera également plus juste car des centaines de milliers d’artistes auront enfin une chance d’être rémunérés pour l’usage de leurs œuvres.

J’espère que ces éléments permettront de répondre à vos inquiétudes.

Bien à vous,

Marc Joulaud

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Je veux bien le lien pour le Pad s’il te plait.