Régulation des activités de communication publicitaire (2)

Pour une régulation des activités de communication publicitaires

2/ Réguler les discours des entreprises

a) Création d’une autorité indépendante pour réguler les contenus de communication

L’organe d’autorégulation de la publicité (« ARPP ») dispose d’une forme d’hégémonie sur les enjeux de régulation des discours. Il réunit les annonceurs, les agences et les régies publicitaires pour guider l’élaboration de règles et les mettre en oeuvre. Au-delà des nombreuses décisions contestables , le contrôle a posteriori des campagnes et l’absence de mécanisme de sanction confirment la faible crédibilité de l’ ARPP.

Les pouvoirs publics doivent intervenir à travers la mise en place d’une autorité administrative indépendante de régulation des contenus publicitaires et de communication qui développera un corpus de règles, sur la base de grandes orientations déterminées par le législateur, et organisera leur mise en oeuvre. La mise en place d’un contrôle a priori des contenus constitue un enjeu important pour la lutte contre la surconsommation.

Trois grands types de règles devront être mises en place :

a) 1. Remettre l’information au centre de la communication publicitaire

Les « informations substantielles » listées dans le code de la consommation paraissent offrir une base intéressante. Actuel­lement, elles servent uniquement à identifier des « omissions » pouvant fonder une pratique commerciale trom­peuse, et leur absence n’est pas forcément jugée contraire à la loi. Il convient donc d’établir la liste des informations « nécessaires », c’est-à-dire de­vant être systématiquement fournies aux citoyens et consommateurs par le moyen des messages publicitaires. Cette liste pourrait ensuite être adap­tée en fonction des secteurs économiques. Dans certains d’entre eux, des informations addition­nelles relatives aux aspects environnementaux ou sociétaux des produits et des circuits productifs devront être introduites, comme l’empreinte éner­gétique, la réparabilité, la valeur nutritionnelle, etc.

a) 2. Réguler la communication produit pour lutter contre l’obsolescence

La communication commerciale et la pression publicitaire en particulier entretiennent directement ces phénomènes d’obsolescence stimulée (ou marketing) et renforcent son ancrage plus large dans la culture contemporaine du jetable.

_ Inscrire les phénomènes d’obsolescence stimulée ou marketing, et la sanction des pratiques industrielles et communicationnelles correspondantes dans le dispositif légal mis en place en 2014 par la Loi de Transition énergétique et pour la croissance verte afin de lutter contre l’obsolescence programmée : l’article L111-4 du code de la consommation.

Ainsi, l’incitation au remplacement des biens en état de marche, la valorisation des produits jetables, le « rétro-shaming » (c’est à dire la ridiculisation de la récupération et de l’ancien), l’abus de l’argument de « l’innovation », les messages trompeurs sur le caractère recyclable ou réutilisable des produits, doivent être interdits et des mentions légales articulées aux messages publicitaires.

a) 3. Réguler les discours sociétaux et corporate pour lutter contre le blanchiment d’image

Dès lors que les activités de communication des entreprises se développent sur le terrain sociétal, leur régulation s’impose, soit via l’intégration de ces discours – et de tous les supports qui les véhiculent – dans le périmètre des pratiques commerciales trompeuses, soit via la sanction du blanchiment d’image corporate au moyen d’un nouvel outil juridique dédié.

Le dispositif pionnier, adopté en 2017, du devoir de vigilance des maisons-mères sur leurs filiales et sous-traitants impose l’établissement d’un document intitulé « plan de vigilance ». Ce document doit contenir une série d’éléments précis d’information sur les risques de violations des droits humains ou de l’environnement liés à leurs activités. La production de ce support doit être suivie de sa mise en oeuvre effective sur le terrain, et ces deux étapes peuvent être l’objet d’un contrôle a posteriori par un juge.

Un suivi effectif est nécessaire pour contrôler la qualité des informations que les « plans de vigilance » apportent sur la réalité des pratiques sociales et environnementales des entreprises. Ces outils pourraient alors s’avérer utiles pour éclairer l’analyse des supports de communication plus grand public – publicité corporate, codes de conduite, etc – et identifier les éventuelles situations de blanchiment d’image.

En renfort d’un juge, ce contrôle des contenus pourrait être assuré par l’autorité publique in­dépendante évoquée précédemment. Quant aux entreprises jugées pour manquement à leur de­voir de vigilance, elles devraient se voir imposer la mention de la condamnation dans tous leurs supports de communication corporate, jusqu’au retour à une situation de conformité.