Les courants sceptiques, aidez-moi à sortir de la brume

Bonjour,

J’avais des questions concernant les différents courants sceptiques français et plus particulièrement les deux courants zététiques qui s’affrontent à longueur de journée sur les réseaux et nous avons avec un petit groupe de pirate commencer à en parler (groupe twitter ouvert à tous les pirates).

Plutôt que de vous livrer ce que j’ai compris de notre échange qui risquerait de fermer trop le débat je vais donc vous poser la question suivante qui me semble bien cadrer le débat. J’ai conscience de la portée polémique d’un tel sujet et mon objectif est bien que nous puissions en parler posément. C’est pourquoi je vous demande de répondre dans le cadre suivant :

Qu’est ce qui définit chacun des courants suivants :

  • courant sceptique;
  • courante zététique;
  • courant zét-éthique.

Dans un second temps quand nous nous serons mis d’accord sur la définition de chacun de ces courants alors nous pourrons nous poser la question de la compatibilité de ceux-ci avec le parti pirate.

Je fais une nouvelle fois appel à votre modération dans vos propos et pour cela je vous propose un petit extrait sur la rhétorique.

extrait du « Pouvoir de la réthorique » de Clément Viktorovitch qui bien évidemment défend l’importance de la rhétorique (Chapitre 2 : choisir les arguments, 4- Comprendre l’existence du désaccord) :

Il nous reste une question à envisager. Si les arguments présentent tous un degré de rigueur bien établi… pourquoi nous arrive-t-il alors d’être en désaccord ? Ne suffirait-il pas, pour chaque problème, d’identifier les arguments les plus rigoureux, et de nous en tenir à la position qu’ils soutiennent ? N’y aurait-il pas, ici, l’opportunité de quitter la sphère embarassante de l’argumentation, pour revenir à la méthode rassurante de la démonstration dans laquelle un raisonnement irréfutable permet d’aboutir à une conclusion inéluctable ? Bien sûr, ce n’est pas si simple. Si un problème auquel nous sommes confrontés nécessite d’avoir recours à l’argumentation pour être tranché, c’est précisément le signe qu’il est sous-tendu par un ensemble d’arguments tout à la fois rigoureux et incompatibles entre eux. Ce qui va décider de la position de chacun d’entre nous va adopter, c’est le poids respectif que nous choisissons de leur attribuer. Nous réussirons peut-être à établir une liste consensuelle des arguments pertinents. En revanche, nous nous déchirerons au moment de déterminer lesquels sont les plus importants. Tout se ramène au fond, à deux désaccords essentiels.
Premièrement, nous ne hiérarchisons pas nos valeurs de la même manière. Bien sûr il est probable que nous souscrivions tous plus ou moins au même corpus de valeurs fondamentales. Mais comment allons-nous les articuler entre elles ? Qu’est-ce qui aura le plus d’importance à nos yeux ? La liberté de chacun ou l’égalité de tous ? La sauvegarde de nos traditions ou le besoin d’innovation ? L’ouverture sur le monde ou la protection de la nation ? Ce type de questions ne possède pas de bonne réponse : seulement des réponses propres aux uns et aux autres.
Deuxiemement, nous ne percevons pas le risque de la même manière. Il est souvent très difficile de s’accorder sur les probabilités qu’un événement se produise ou non. Quelles sont les chances qu’un krack boursier se produise ? Qu’un attentat ait lieu ? Qu’un pays déclare une guerre ? Il est possible de les évaluer, bien sûr. Il est plus délicat de parvenir au consensus quant à cette évaluation. Et quand bien même nous l’attendrions, encore nous resterait-il à qualifer cette probabilité. Trente pour cent de chances qu’un risque - quel qu’il soit - se produise : cela nous paraît-il acceptable ou inacceptable ? Rassurant ou effrayant ? Raisonnable ou déletère ? Là encore, la réponse à ces questions ne peut être qu’éminemment personnelle.
Voilà pourquoi il n’existe pas de vérité. Pas de position juste ou bonne. Selon la manière dont nous hiérarchisons les valeurs et percevons les risques, une ligne de raisonnement finit par nous apparaître préférable aux autres. Nous arrêtons notre position. Et constatons que malgré tous nos efforts de rigueur, elle aura toujours ses contradicteurs.

1 J'aime

Est ce que la différence ne tient pas juste dans la manière et le degré d’intégration des sciences sociales dans ces courants ? Et notamment de la psychologie sociale, de la sociologie, de l’anthropologie, de l’analyse critique que ces courants proposent du courant zetetique lui même.
Mais peut-être que je me plante de débat auquel cas vous men voyez désolé :sweat_smile:

1 J'aime

Je pense que tu as raison. Mais de mon point de vue, ils ont intégré les sciences sociales comme les écologistes ont intégré l’écologie : mal, précipitamment et … politiquement. Le gros reproche que je fais à ce courant est que d’un côté la radicalité portée entraîne des débordements qui ne sont pour moi pas entendables (je préviens, « what do you expect after punching a nazi ? maybe punching more nazis » est entendable) et de l’autre, un oublie complet que les sciences sociales sont :

  • contextuelles,
  • des sciences (et de fait, non prescriptives)

Quand donc on se réclame d’une sociologie politique en parlant de l’intégration de la sociologie dans la politique, l’erreur devient systémique. C’est d’ailleurs pour moi une grande différence entre le Parti Pirate et d’autres courants : on mesure notre morale, notre politique à l’aune de la science et on propose des arbitrages, et non l’inverse.

Je crois que tu es pleinement dans le bon débat :heart:

1 J'aime

Wow. Très intéressant. Argument qui me semble majeur… ça met un mot sur ce qui me gêne depuis un moment avec un certain exercice « militant » de la sociologie : l’aspect prescriptif – venant par ailleurs de mouvements qui conviennent que ce n’est pas à la science de décider. Donc, ou bien les mouvements en question ne considèrent pas la sociologie comme une science, ou bien ils lui attribuent un rôle de prescription bien qu’elle soit une science.

Merci pour cette citation. J’aime bien C. Viktorovitch qui a une pensée claire et démonte les procédés rhétoriques, ce qui est de salubrité publique. L’extrait est intéressant, mais je trouve qu’il idéalise un peu le rôle de la rhétorique : celle-ci n’est pas seulement en pratique l’art de l’argumentation, mais aussi l’art de convaincre, voire manipuler (que ce soit sciemment ou non) ; et là on sort du cadre de l’argumentation « défendable » : sophismes, etc. Pour le dire autrement, il semble difficile de ne voir ça que sous le simple prisme de priorités subjectives. Mais vu que ce n’est qu’un extrait, j’imagine qu’il développe d’autres points dans le livre.

Je pense que c’est une erreur de définir ça comme des courants. Ce ne sont pas des courants de pensée.
L’affrontement sur Twitter en du fait des communautés, et les violences verbales ne proviennent initialement pas forcément des têtes d’affiches de ces communautés, mais bien de la masse.
L’éclatement des conflits est ensuite souvent plus visibilisé par les meneurs du fait de l’aspect réseau social et des bulles amplificatrices.

Une fois ce point de langage mis de coté, je dirais que la communauté des zet mené par acermandax mr sam DBE etc, a une tendance a utiliser des outils du scepticisme sans vouloir en adopter la démarche sur tous les aspects qu’il traitent. Pour servir un propos, il sont souvent prêt à faire une analyse facile sur des points facilement debunkables en mettant de coté les tenant et aboutissement sociaux-politique.
ça en fait une communauté (je parle bien de la communauté et pas forcément des têtes d’affiche) ayant des certitudes sur beaucoup de sujets qui suit aveuglément des conclusions de celui qui parle le mieux sur youtube. Le problème est qu’ils ont une démarches classant les sciences selon des critères jamais validé par le consensus scientifique, ce qui a froissé la communauté dont je parle ci dessous.

De l’autre coté la communauté que tu nomme zet éthique (menée par tankietfield commevousdite, downtoearth, simon bordeline tomas faquin etc), et qui donc est mené par les gens qui publient sur ce blog, sont plus issus du monde académique, et ne se définissent presonelement que peu comme étant des sceptiques. Le blog a d’ailleurs été créé en réaction aux problèmes de la démarche des premiers.Je dirais que le terme de gauche laser que Usul a utilisé a été plutôt bien repris et assimilé par cette communauté.
Le coté non prescriptif des sciences est au coeur de la démarche de la gauche laser sur leur production sur internet. Mais pour des raisons de format sur twitter, il y a des raccourcis qui sont aussi interprétables.

Les attaques constantes du premier groupe sur les sciences sociales et les tentatives infructueuses du second de corriger les premiers au début de leur interaction, ont rendu les seconds tendus et acerbe sur les réseaux.

Pour terminer je vais parler rapidement du courant sceptique dans son ensemble qui est en fait inexistant, ça n’est qu’une démarche qui est inatteignable en pratique et les sciences cognitives l’ont d’ailleurs démontré. le cerveau humain a besoin de certitude, qui peuvent être remise en question mais pas toutes à la fois et pas en permanence.

En conclusion, je pense que mon premier point est en fait le plus pertinent de ce que j’ai écrit jusqu’ici, nous pouvons nous poser la question de l’adéquation entre le PP avec certaines communautés, mais parler d’adéquation avec un courant de pensée qui n’a pas de réalité ou d’existence proprement parlé un non sens.

1 J'aime

Petit récit personnel avec la zététique:
J’ai découvert ces différents courants sur twitter assez récements m’étant inscrit sur twitter en octobre 2021 et ainsi tout les débats et conflits qui existent entre ces courants. Par contre la question de la zetétique je l’ai connu bien avant (au alentours de 2015), via mon frère (ancien membre du Cortecs) et par les cours de zététique de Richard Monvoisin (fondateur du Cortecs) en cours optionnel de L1 (accessible en ligne sur la chaine Youtube de l’UGA) .

De mes souvenirs, le cours de Richard Monvoisin est assez apolitique, même si lui même se revendique clairement de gauche. Ce cours, n’aborde pas en particulier les questions des sciences sociales, mais plutôt la méthode scientifique, que ça soit en science sociale ou autre.

J’ai d’abord été sceptique vis à vis de la TEB et des autres youtubeurs, leurs manière de parlé de zététique étant différentes de celle de Richard, nécessairement moins académique, du fait du format de youtube. Pour autant je pense avec du recul que leurs démarche à permis de faire découvrir la zététique à un grand nombre, et ceci est à mon sens louable.

Je pense que le débats qui existe sur la question du traitement des sciences sociales par la zététique, n’est pas un débat de zététiciens, mais plutôt un débat inhérents au sciences sociale.

Je m’explique. Ayant un deug en économie-gestion à Grenoble, une licence éco-socio et un master en économie écologie à Toulouse Jean Jaures (ex Mirail, réputation de fac de gauche), j’ai eu l’occasion de voir un conflits au sein même des profs que ça soit en sociologie, en anthropologie, ou en économie. Dans toutes ces sciences le débat est celui de la finalité de ces sciences: certains profs aborde leurs science comme n’étant pas une science (argument notamment entendu en sociologie) et abordant leurs domaine comme ayant un but politique. Ici la recherche doit orienté le politique dans le sens des travaux du chercheur lui même admettant sa recherche comme ayant un but de lutte sociale par exemple.

D’autres prof considère que leurs recherche sont orienté politiquement (comme les précédents), mais que leurs recherche et leurs domaines sont des sciences. Ainsi les sujets traité vont dans un sens politiques, mais la finalité de ces recherches n’est pas de convaincre à tout pris les politiques.

D’autres profs encore considèrent que leurs objets n’est pas politique, mais sociale ou sociétale, que leurs sciences est bien une sciences avec leurs méthodologie propres comme toute sciences, et leurs but n’est pas politique. Ici les chercheurs ont des approches qui sont plutôt proche des méthodologies qu’on trouve en science dites dure, et ils considèrent que les politiques doivent globalement s’intéressé au sciences, sans que les sciences cherche à avoir un objet politique.

Ma typologie est un peu cliché, mais je pense que c’est une partie de la réponse au traitement des sciences sociale de la zététique. Le débat est pour moi interne au science sociale (science ou non, politique ou non) et je pense que c’est aux chercheurs en science sociale de le traité, et que la zététique n’a pas a tranché se débat. Le niveau de maturité des différentes sciences (sociale ou non) n’est pas le même partout et je pense que ça explique une partie des problématiques et des débats.

Pour conclure, je ne peux que vous conseillez de suivre un Empiriciste, et l’Economiste Sceptique qui essai d’aborder leurs sujet (l’économie essentiellement mais pas que) avec un angle sceptique/zététique.

3 J'aime

@alexscott, tiens il est sorti un article aujourd’hui qui parle exactement de ce sujet !

J’ai tout lu avec beaucoup d’intérêt, puisque je suis avec assiduité le travail de la Tronche en Biais. Mais je retrouve dans ce billet de blog le même problème que dans beaucoup d’autres : il évoque des figures assez représentatives (TeB, Mr.Sam, …), puis attaque de manière assez floue des « rationalistes », ou des comportements attribués à une communauté, mais sans exemple précis.

Or, un des fléau d’internet à mon humble avis, c’est qu’il donne de l’importance à des gens qui sont peu représentatifs, voir même assez insignifiants. C’est un travers que je vois chez certains sceptiques ou journalistes qui, pour dénoncer certaines attitudes ridicules ou dangereuses, diffusent des messages venant de comptes pourtant insignifiants (en nombre d’abonnés ou de pouces). C’est la même attitude que certains réactionnaires, qui font passer pour une lame de fond dangereuse (woke, par exemple) des prises de position en réalité très marginales.

Au passage, j’aimerais justement savoir à quel point ce billet de blog est représentatif d’un fort courant d’opinion, car je ne connais pas l’auteur…

Bonjour tout le monde,

Pour moi, c’est ici que se fait le sérieux de l’approche sceptique, ou qu’il ne se fait pas.
Je trouve la tribune Genre : « Il est inadmissible d’instrumentaliser la biologie » pertinente pour démontrer ça. Elle parle spécifiquement de la théorie du genre et des critiques qui utilisent la « biologie » (genre « nous sommes avant tout des zetres biologiques »), mais je pense que la citation suivante est extensible à bien d’autres domaines (si ce n’est tous…) :

S’il y a évidemment des différences biologiques entre les hommes et les femmes, les sociétés humaines ne se réduisent pas à la dimension biologique de l’être humain, et de nombreux travaux récents, notamment sur la plasticité phénotypique, l’épigénétique et les approches écologiques du développement, ont montré qu’il était souvent difficile, voire impossible, de faire la part entre la « nature » et la « culture ».

Les sociétés humaines sont le résultat d’interactions complexes entre des facteurs biologiques, psychologiques, sociaux et culturels, si bien qu’aucune discipline, qu’il s’agisse de la biologie ou d’une autre, ne saurait confisquer le discours intellectuel sur les différences entre femmes et hommes.