Débats 2024-07 : Pour une une éducation nationale émancipatrice

Exposé des motifs

Exposé des motifs

Cette motion entend déterminer une ligne en matière de politique éducative pour le Parti Pirate, de manière à se détacher d’un programme éducatif actuel composé de 12 points élaborés en 2017, peu innovants, ne reflétant pas, voir étant contradictoires avec l’idéologie pirate. Ces points programmes peuvent porter préjudices au vu de la faiblesse de leur argumentaire et de l’inexactitude de leur propos.

Cette motion s’est cependant inspirée de certains de ses points et de l’ensemble des discussions qui ont lieu sur le forum afin d’y rassembler les grands défis auxquels fait fasse le système éducatif français.

Elle entend à la fois donner des billes en terme de philosophie éducative à nos portes paroles qui tiendrait plus d’un idéal, mais aussi proposer des points de réformes prioritaires à mettre en place rapidement.

Cette motion induit l’abrogation des motions suivantes :

Contenu de la proposition

Pour une école émancipatrice et démocratique

Le Parti Pirate se positionne pour un service publique de l’éducation qui aurait pour mission principale l’émancipation des individus. Cette émancipation doit permettre le développement physique et intellectuel des individus, de manière à ce que ces personnes puissent mener la vie libre qu’iels souhaitent.

En cela donc, cette éducation doit non seulement former à l’apprentissage des fondamentaux scolaires mais doit aussi permettre aux individus de pouvoir mener leur vie sociale, citoyenne, leur vie économique, leur santé en toute sérénité.

Le Parti Pirate envisage l’école comme une opportunité pour des jeunes citoyens de participer activement à la société.

En cela donc, le Parti Pirate ne peut pas envisager un système éducatif dans lequel les jeunes seraient amenés à subir les décisions prises par les adultes, politiques, parents, personnel éducatif. Un tel fonctionnement ne ferait que reproduire le schéma dysfonctionnel d’une société autoritaire.

Il doit leur être donné l’opportunité de participer activement à la vie de leur établissement, de prendre de décision sur l’allocation des budgets, l’organisation de la scolarité.

Cette nécessité pour amener au développement d’individus émancipés n’empêche pas que les établissements éducatifs soient contraints à un certains nombre de missions. La seule différence tient à la manière dont les principaux intéressés participent à ce processus décisionnel pour la mise en oeuvre de ces missions.

Proposition 1: Le Parti Pirate préconise de renforcer la place des élèves dans les instances des établissements et de leurs donner un véritable pouvoir, à part égale avec l’équipe éducative et les parents.

Proposition 2 : Le Parti Pirate préconise que les options, langues, spécialités et orientations scolaires ne puissent être le choix que de l’élève et pas de leurs représentants légaux, ni des enseignants.

Pour un vrai service publique de l’éducation et la fin de l’école privée

Dans un système éducatif où les jeunes et le personnel éducatif prends part aux décisions de son établissement, la voie devient libre pour mener des expérimentations éducatives de toutes sortes. Ainsi, l’intérêt d’établissement d’enseignements privés dans ce but devient obsolète.

De la même manière, dans une volonté de gestion du budget qui dépende du nombre d’élève accueilli dans l’établissement plus que du projet éducatif et de l’offre de l’établissement, ou encore du contexte socio-économique, il ne devient pas acceptable que des établissements privés demandent à des familles une participation financière supplémentaire.

En effet, mettre en concurrence un service publique de l’éducation et des établissements privés d’éducation donne l’opportunité au privé de sélectionner ses « clients », de se concentrer sur des segments de marché plus rentables, laissant le secteur public desservir les populations moins rentables ou nécessitant des services plus coûteux à fournir.

Une des conséquences de cette mise en concurence est la ségragation socio-économique faisant de la france une championne des inégalités scolaires :

Dans les pays de l’Organisation de Coopération et de Développement Économiques, l’écart moyen entre les élèves issus de milieux socio-économiques favorisés et ceux de milieux défavorisés est de 93 points en mathématiques. En France, il est de 20 points de plus – 113 points à ceux des élèves défavorisés. Il s’agit de l’un des plus importants écarts liés au milieu socio-économiques, « des écarts plus importants ne sont observés qu’en République slovaque ou encore en Israël », précise l’OCDE.

Le secteur privé est en effet facteur de ségrégation comme nous le rappel ce papier des cahiers pédagogiques :

Depuis 20 ans la mixité recule dans ces établissements. Les élèves de familles très favorisées, qui constituaient 26,4 Pourcents des effectifs de l’enseignement privé sous contrat en 2000, en représentent 40,2 Pourcents en 2021 et les élèves de milieux favorisés ou très favorisés sont désormais majoritaires dans ce secteur – 55,4 Pourcents en 2021 – alors qu’ils représentent 32,3 Pourcents des élèves dans le public ». Et quant aux élèves boursiers, ils sont près de trois fois plus nombreux dans le public que dans le privé (11,8 Pourcents dans le privé contre 29,1 Pourcents dans le public en 2021). La révélation des IPS en novembre dernier avait aussi montré la forte ségrégation à l’œuvre.

En plus des conséquences sur la mixité, l’éducation privé coûte cher :

Le budget de l’enseignement privé sous contrat s’élève à 8 milliards en 2022, « ces crédits financent à la fois la rémunération des enseignants et le forfait d’externat versé aux établissements du second degré, destiné à couvrir leurs charges de personnels de vie scolaire ». Les écoles sont ainsi financées pour 55 Pourcents par l’État contre 74,3 Pourcents pour le public. Les collèges et lycées sont quant à eux financés pour 55,2 Pourcents par l’État dans le privé et 58,6 Pourcents dans le public. La part restante est en majorité financée par les familles dans le privé et par les collectivités locales dans le public. Selon une règle non écrite, un ratio de 20 Pourcents est appliqué pour déterminer la part des effectifs dans le privé (80 Pourcents d’élèves dans le public, 20 Pourcents dans le privé).

Proposition 3 : Le Parti Pirate préconise que, en ce qui concerne l’enseignement générale, du primaire au lycée, la création de structures privées lucratives ou non n’est plus autorisé.

Proposition 4 : Le Parti Pirate préconise que des moyens soient alloués pour faciliter le suivi de l’enseignement à distance afin d’adapter l’école aux besoins de tous et de ne plus faire du CNED une solution par défaut.

Proposition 5 : Dans le cas ou la proposition 3 n’est pas mise en place, et dans l’attente de sa mise en place, un élève doit pouvoir refuser son inscription par les parents dans une école privée ou confessionnelle.

Au centre, une question de budget

Bien que l’idéal Pirate demanderait une refonte profonde du système éducatif actuel, il semble impossible de tendre vers ce dernier sans engager les 1,2 millions de professionnels qui y travaillent. Comment oser demander à un personnel éducatif de se réformer, d’envisager de nouvelles manières d’éduquer si ce dernier n’est pas considéré, en premier lieu de part un salaire décent ?

De la même manière, il est difficile de demander à des établissements d’innover, de faire face à ses nouveaux défis éducatifs sans un budget adequat.

La France, bien qu’ayant un budget consacré à l’éducation supérieur à la moyenne européenne, semble laisser de côté ses enseignants et ses établissements.

Une des explications de cette incohérence peut-être expliqué par le plus grand nombre de jeunes dans notre pays : nous possédons 17,67 Pourcents de moins de 14 ans en France contre 15,56 Pourcents au Canada, 15,59 Pourcents en Finlande.

Une autre explication à ce sentiment d’être laisser de côté tient à la rémunération des enseignants. Ils sont en moyenne moins bien rémunérés [que dans d’autres pays de l’OCDE et ont plus d’enfants par classe ](Page Rendering Error | OECD iLibrary Pourcents2Fcontent Pourcents2Fcomponent Pourcents2F33af4eb8-fr).

Autrement dit, il nous faudrait changer la manière dont nous pensons le budget de l’éducation, en passant, notamment dans nos comparaisons, d’une réflexion fondée sur le budget général à une réflexion fondée sur le budget alloué annuellement à un élève.

Bien heureusement, le ministère de l’éducation nationale fournit des chiffres à ce sujet.

Ces quelques données chiffrées permettent d’avoir une idée du coût annuel mais cachent, parce que ce sont des moyennes, une autre réalité qui tient à l’inégalité de répartition de ces coûts entre les établissements.

Et, difficile de promettre une éducation égale pour tous, si, en 1er lieux, les budgets alloués par élèves ne sont pas les mêmes. Un arrêté de le Cours des Comptes de 2012 évoque cette situation :

Plus généralement, la Cour observe une absence de corrélation entre les difficultés scolaires constatées sur le terrain et les moyens d’enseignement alloués par le ministre de l’éducation nationale, voire même parfois des sutiations paradoxales, dans la mesure où des établissements confrontés à un échec scolaire important peuvent être moins bien dotés que des établissements qui ont des taux de réussite plus élevés.

Dans ce rapport on comprend que l’attribution des budgets dépend de critères critiquables :

  • Pour le permier degré, l’appartenance à une zone rurale ou urbaine, la catégorie socio-professionelle moyenne des familles, la proportions de parents allocataires de minima sociaux)
  • Pour le second degré, la dotation de l’année précédente pour une académie et un calcul des besoins d’encadrement des élèves par les enseignants pour les différentes formations

La Cours souligne un manque de transparence dans ces critères. En effet, il ne serait pas possible de calculer à partir de critères explicites les dotations qui seront accordées aux académies.

Proposition 6 : Le Parti Pirate préconise que les budgets dédiés aux établissements se fondent sur une base fixe fonction du nombre d’élève par établissement afin de garantir transparence et égalité dans le système de dotation.

Proposition 7 : Le Parti Pirate préconise que les établissements du primaire, collège et lycée soient dotés d’un budget issu directement du ministère de l’éducation nationale et ne soit plus de la compétence des communes, ou d’autres collectivités.

Pour la revalorisation du métier d’enseignant

Pour remplir leurs missions, les professionnels de l’éducation doivent être bien mieux soutenus et considérés qu’ils ne le sont aujourd’hui, en terme de rémunération comme de conditions de travail.

Ainsi, le salaire des enseignants français reste de 10 à 15 Pourcents inférieur à la moyenne des pays de l’OCDE, et l’écart est plus fort encore avec certains pays proches comme l’Allemagne (où la rémunération est pratiquement 2 fois supérieure !). En cause tient notamment le manque de progression du point d’indice.

Pourtant, même si le budget consacré à l’Education Nationale est relativement important en France (6,6 Pourcents du PIB), il est à peine supérieure à la moyenne de l’OCDE si on le rapporte au nombre d’élèves, plus nombreux en France.

A nouveau, des pays proches comme l’Allemagne ou la Belgique mobilisent davantage de moyens par élève.

Il est importante de rappeler, que, dans l’État n’est pas un ménage, et que dans son cas bien particulier, les dépenses font les recettes. Ainsi la question budgétaire ne doit pas s’envisager sous l’angle de savoir où réduire les dépenses mais bien de savoir où dépenser pour assurer des recettes futures.

L’éducation fait partie des domaines permettant un bon retour sur investissement, à moyen et long terme comme l’explique cette note de l’OCDE et cet article d’alter éco.

Proposition 7 : Le Parti Pirate préconise que le salaire des enseignants soit relevés à une valeur équivalente à 2 fois le SMIC en début de carrière et que ce dernier y soit indexé. Le Parti Pirate propose qu’un débat soi mené sur une revalorisation conséquente du point d’indice d’au moins 10 Pourcents en parallèle.

Financer l’enseignement professionel par les entreprises

Dans la droite ligne de la création d’une école émancipatrice qui ne ségrègue pas et dans une optique de gestion budgétaire, il semble nécessaire de laisser le privé porter entièrement le coût de l’enseignement professionnel. L’école Pirate n’a pas vocation à supporter le coût des besoins en compétence professionelle des entreprises.

Pour autant, les ministères restent tout à fait libres de conserver leurs prérogatives en terme de régulation des diplômes émis en liens avec les branches professionnelles. Cela n’empêche pas les établissements dits « généraux » de développer des activités pédagogiques techniques en leur sein, mais cette fois libérée des contraintes du monde professionnel.

Avec 643 800 élèves concernées et une moyenne de 12 740€ de dépense moyenne par élève, ce budget de 8 milliards d’€ est mis au service d’une école émancipatrice, pour tous.

Proposition 8 : Le Parti Pirate se positionne pour que l’enseignement professionnel soit entièrement financé par les entreprises.

Une école aux défis importants

Un certain nombre de problématiques importantes devraient faire l’objet de discussions plus approfondies, parmi les suivantes :

  • La formation continue des enseignants, notamment sur les méthodes pédagogiques fondées scientifiquement , le lien direct avec la recherche et les professionnels de l’université.
  • La réflexion sur des pratiques éducatives qui n’alimentent pas le harcèlement entre élèves, qui ne dégrade pas les inégalités sociales.
  • La mise en place d’une réelle éducation sexuelle à l’école, en commençant par appliquer la loi voté à ce sujet.
  • Une refonte du système d’évaluation individuel continue qui doit pouvoir prouver son intérêt pédagogique ou arrêter d’exister. Cela n’exclue pas la mise en place d’évaluations standardisées à différents moments de la scolarité afin notamment d’obtenir des chiffres nationaux sur la réussite des élèves et d’adapter au mieux la politique éducative.
  • L’intégration d’une souplesse dans les modalités d’apprentissage et d’organisation du temps scolaire pour les élèves, dans l’enseignement à distance, l’intégration des élèves en situation de handicap.
  • Une réflexion sur le rapprochement entre les filières générales, technologiques et professionnelles afin de promouvoir une éducation émancipatrice qui laisse autant de place, pour tous, une liberté de choix et un accès facilité à l’ensemble des activités.

Ces défis ne peuvent pas être relevés tant que les professionnels ne sont pas mieux rémunérés et tant que les élèves ne sont pas intégrés aux décisions qui les touchent directement.


Lien vers Congressus : Congressus : Session Juillet 2024 - Assemblée Permanente - Pour une une éducation nationale émancipatrice

    Rapporteur : @Bibo
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Pas de panique, motion déposée pour la session de Juillet après les européennes

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Titre modifié :wink:

Plusieurs choses m’ont fait tiquer. Quand tu dis que le PP « préconise », ou « se positionne », qu’est-ce que ça signifie ? C’est ok pour faire de la comm’ « générale » mais si on nous demande « comment vous comptez mettre ça en place », c’est mieux si on sait répondre concrètement. Autrement dit, on gagne les prochaines législatives, on fait un projet de loi éducation, et on met quoi dedans ? Comment on met en place nos propositions, comment on les finance, etc. « Un décret précisera les modalités d’application de la présente loi » n’est pas une réponse suffisante. :stuck_out_tongue:

Maintenant, sur le fond, je souhaite revenir sur ceci.

Au début, j’ai eu un peu peur, j’ai cru que tu voulais lâcher les gosses dans la nature en leur disant de faire ce qu’ils voulaient. Il s’agit donc d’impliquer les élèves dans la vie de leur école, y compris les budgets et l’organisation de la scolarité. Pas mal de choses me viennent en tête, ça risque d’être un peu décousu.

D’abord, qui serait concerné ? Les élèves du primaire ? Du secondaire ? Il peut être intéressant de montrer aux enfants de manière concrète ce qu’est un budget avec un cas qui les concerne en premier lieu et au quotidien. Cela peut aussi leur donner une conscience politique et une envie de s’engager. Maintenant, comment cela se traduirait ? Nous sommes les mieux placés pour savoir qu’il ne peut y avoir de décision éclairée sans débat ouvert avec toutes les cartes sur la table. Là, j’imagine par exemple une ou plusieurs demi-journées par année consacrées exclusivement à cela, qui pourraient rentrer dans le cadre d’enseignements d’ECJS / éducation civique (je ne sais pas quel est le terme utilisé aujourd’hui). On pourrait, à l’issue des débats, faire voter les élèves sur les décisions qui les concernent (ce qui pourrait être l’occasion de montrer et d’enseigner des façons de voter comme le Borda ou le jugement majoritaire). Cela implique de définir aussi quel serait le poids du vote des élèves, puisque je suppose que le personnel de l’école participera au scrutin aussi. Il ne sert à rien de leur donner que 10%, ce serait du foutage de gueule. Avec du 50%, on envoie le signal que leurs voix comptent autant que les autres.

Ensuite, plus spécifiquement, sur la phrase suivante.

un système éducatif dans lequel les jeunes seraient amenés à subir les décisions prises par les adultes, politiques, parents, personnel éducatif

Même en impliquant les jeunes en question, on reste dans un système où les jeunes subiront les décisions prises par d’autres. Ce que je cherche à dire, c’est que toutes les décisions prises par les adultes ne sont pas forcément à jeter. Certaines décisions vont toutefois être délétères pour certains élèves. Elles resteront délétères mêmes si elles ont l’appui d’autres élèves.

Proposition 2 : Le Parti Pirate préconise que les options, langues, spécialités et orientations scolaires ne puissent être le choix que de l’élève et pas de leurs représentants légaux, ni des enseignants.

C’est pas déjà le cas ? Quand j’étais au lycée, il ne me semble qu’aucun enseignant n’a eu son mot à dire sur mes choix d’options / d’enseignements. D’ailleurs, ces choix sont forcément influencés par l’environnement social et culturel, et donc fatalement par la famille. Aussi, les élèves peuvent subir des pressions de leurs parents / représentants légaux quant à ces choix, malheureusement. Même si c’est souhaitable, ça me semble être un vœu pieu de vouloir empêcher des parents de contraindre ce genre de décision. Plus précisément, il faudrait définir comment faire.

Enfin, un mot en tant qu’enseignant dans le supérieur. Je considère tout un chacun comme responsable, ce qui m’est parfois déconseillé voire reproché par certains collègues. Il est vrai que certaines personnes, à 18 ans, n’ont pas la maturité nécessaire pour ne pas faire n’importe quoi quand on leur laisse trop de liberté. Je me demande si donner trop de pouvoir à des élèves de 10, 14 ou même 16 ans ne risque pas d’être contreproductif. Après, c’est dans l’ADN du parti de vouloir rendre chaque individu responsable de sa liberté.

En espérant que ce n’était pas trop bordélique.

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